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ladytherapy
10 octobre 2005

TES mensonges

J'ai beau le savoir, je ne m'y fais simplement pas. Les années passent et j'espère soit me tromper, soit que tu vas changer.

Je me dis toujours que ce que tu vas faire la prochaine fois ne me fera pas de mal. Ne fera de mal à aucun de nous. Ne détruira rien.

D'une certaine façon toi et moi ne jouons pas dans la même équipe. Je veux que cette famille se comporte de façon saine et normale, que chacun accepte les défauts des autres et vive en Paix, tandis que tout ce que tu veux c'est avoir de l'emprise sur chacun d'entre nous, et que tout le monde tourne autour de toi. Tu aimes que nous dépendions de tes manigances, des vérités que tu balances précautionneusement et stratégiquement. Cette famille est un RISK grandeur nature pour toi.

Je ne sais pas d'où tu tires cette force qui, depuis tant d'années maintenant, te permet de nous détruire les uns après les autres. Tu nous ravages tous un peu. Le temps passe et on dirait que tu as une espèce de plan où chaque rouage s'est mis en place lentements ces dernières années par tes soins.

Rien de nouveau pour moi que tu mentes. Rien de nouveau pour moi que tu fasses des prétendues confidences au moment opportun. Ce n'est même pas nouveau que je te prenne en flagrant délit de double ou triple mensonge.

Ce qui est nouveau c'est que ça me rend malade à ce point. D'ordinaire je suis écoeurée, et dans les minutes qui suivent, les choses deviennent comme implicites. Elles ne ressortent plus. Ca ne fait plus mal. C'est juste un état de fait. Et au bout de quelques mois c'est oublié.

Mais cette fois-ci, peut-être bien que la limite a été atteinte. Peut-être que tu as tapé un trop grand coup. Cette fois-ci tu m'écoeures. Et même physiquement. J'ai envie de vomir quand je pense à toi. J'ai le coeur lourd de penser à ce que tu es et ce que tu fais. Depuis hier soir je n'ai presque pas cessé de pleurer et de te haïr tout à la fois.

J'espère que tout ça ne se tarira pas. Que je sècherai extérieurement mes larmes de dégoût et d'humiliation, mais que le souvenir ne se défraîchira pas. Que je te regarderai toujours avec mes lunettes spéciales pour se rappeler que tu mens, mes rayons X à moi.

Moi aussi je vais commencer à faire des plans. Des plans d'avenir où chacun joue son rôle.

Mon plan à moi c'est de ne jamais contraindre qui que ce soit par le mensonge. Mon plan à moi c'est de ne mentir que sur le goût d'un plat ou l'intérêt d'une série. Mon plan à moi c'est de trouver la force de n'avoir jamais peur de dire la vérité pourl es choses importantes, et de trouver un moyen de les dire au moment où ça ne fera pas mal. Mon plan à moi c'est de te regarder dans quelques années avec mépris et t'annoncer que ton plan à toi, t'aura permis de perdre ta fille, de la même façon que tu as fait perdre sa fille à mon père.

Et quand tout ça sera loin derrière, quand je n'aurai plus cette boule de haine en moi, quand j'aurai l'impression d'avoir accompli le contraire de ce que tu cherches à faire de moi, alors je deviendrai moi-même une mère et/ou une tante et je donnerai tout ce que tu m'as retiré ces dernières années. Et il ne me viendra même plus à l'idée d'avoir fait mieux que toi, ce sera si bon de ne même plus me rappeler que tu existes !

Tu veux détruire cette famille ? Ton oeuvre est prête d'être achevée et je ne peux rien faire contre. Mais je ne jouerai plus à ça.

Tu es ma némésis et je te hais plus cordialement que tu ne m'as fait haïr ton mari.

Tout le monde peut se tromper ! Je me suis trompée sur toi quand j'espérais que tu voulais le bien de quelqu'un d'autre que toi.

Tu n'es pas faible, tu es juste ignoble.

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11 juin 2005

J'ai intérêt à vivre vieille

...sinon tout cela serait un foutu gâchis.

Un peu de calcul. Si j'ai de la chance (et rien n'est moins sûr), à la fin de l'année scolaire prochaine, j'aurai un diplôme de plus, et 24 ans. Bon les 24 ans c'est à peu près sûr, le diplôme, on verra. Je compte large et je me dis : 6 mois pour retomber sur mes pieds et trouver un job. A ce moment-là, à ce moment-là seulement, je pourrai me délivrer de tout ce qui pèse actuellement et depuis toujours : l'ambiance de ma famille.

Waloooooou ! Vous vous rendez compte ? J'aurai passé 25 ans à pleurer et souffrir à cause de mes parents ! A être happée malgré moi dans leurs vies viciées !

Un quart de siècle !!!

Alors, c'est sûr, j'ai intérêt à vivre vieille... Parce que mourrir à 30 ans ou même seulement 60, ce serait plus que de la guigne : de l'acharnement. J'espère bien qu'il viendra un temps où je pourrai ne plus me sentir suffoquer.

En même temps j'ai bon espoir. On dit que pour vivre vieux, il faut manger sainement, ne pas fumer, ne pas boire... et je fais à peu près tout cela (bon, mon repas quotidien est plutôt équilibré en tous cas)... mince il paraît aussi que les dépressifs sont plus facilement victime d'accidents cardio-vasculaires (et encore, sans compter les posibilités de suicide).

Vous voyez un peu le cercle vicieux ? Pour vivre vieux, il faut n'être pas dépressif, mais j'ai besoin que le temps passe et que je vieillisse pour que les choses s'arrangent.

C'en est déprimant.

L'un dans l'autre, il vaut carrémement mieux que je meure sans trop tarder.

28 juin 2005

Il y a aussi des départs heureux

C'est enfin, c'est demain, le grand jour...

...bon enfin techniquement on est déjà demain mais en ce qui me concerne, J-7h00 avant de partir de chez Mirador.

Destination CA, en banlieue parisienne, pour environ deux mois le temps que l'achat de l'appartement définitif soit signé entre la mi et la fin août. Et là, enfin, ce que je n'ai pas eu depuis un an maintenant : de la stabilité. Ne plus avoir peur d'être délogée (disons, pas plus que lorsque j'habitais Paris).

J'ai hâte. Pas seulement de me libérer de l'emprise de Mirador, mais surtout de respirer. Ce à quoi j'aspire depuis des mois, et dans le fond, peut-être des années, va commencer lentement mais sûrement à se concrétiser. Enfin, de l'air. Enfin, de l'indépendance.

J'ai l'impression d'être taillée pour avoir de l'espace. J'aime contrôler quand on peut me joindre, et qui peut le faire. Je suis une grande fan de l'affichage du numéro par exemple.

J'aime décider où et quand. Lorsqu'on vit avec quelqu'un, qui que ce soit, on n'est jamais accompagné lorsqu'on le souhaite, ni, a contrario, laissée seule quand on en a besoin. Cela fait des mois que j'ai l'impression que mon corps entier réclame la solitude auto-gérée. Celle qui fait que lorsque j'ai besoin de calme (et plus le temps vient, plus j'en ai besoin), je peux me couper du monde et ainsi repartir plus sereinement à l'attaque. Celle, aussi, qui fait que lorsque j'ai envie de déconner ou me confier, je sais quel numéro composer, ou qui aller voir. C'est la solitude qui sera mienne quand dans quelques mois les choses seront enfin stables.

J'ai l'impression que demain je vais m'envoler un peu. Je vais sans doute encore grandir dans les mois à venir. Apprendre de nouvelles choses. Réapprendre la solitude aussi. La réapprivoiser lentement. Je pressens encore quelques mois, voire maximum un an de tatônnements. Mais ça y est. J'arrive au bout. Je peux sentir l'air frais. Encore quelques mois à suffoquer calamiteusement de temps à autres. Encore quelques mois de larmes et de doutes. Mais au bout...

Sur Morning Musume - Never Forget... je sais, ça fait cliché. Mais j'arrive pas à me l'ôter de la tête.

27 août 2005

Recyclage

Ca fait bien longtemps que mes rêves ressemblent à des films. Ils bénéficient depuis environ une dizaine d'années de très jolis éclairages, d'histoires prenantes et de plans de camera extraordinaires. Je me fais souvent la réflexion que beaucoup de mes rêves feraient de formidables scenarios de films. Je suis sûre qu'on en a écrit des tas de bien moins consistants (et ce ne serait pas tellement plus éthéré que certains David Lynch...). J'ai même parfois la chance d'avoir une mini-série, sur plusieurs nuits. Et naturellement je me fais de temps à autres des rediffs, mais jamais sur les plus plaisants (comme les vraies rediffs, quoi). Mes rêves n'ont pas toujours été comme ça. Il y a eu une longue période pendant laquelle mes rêves étaient parfaitement fadasses et du plus haut linéaire. Et je ne parle même pas de mes cauchemars qui n'auraient même pas mérité l'appellation de série Z tant ils étaient convenus (effrayants, je ne le nie pas, mais parfaitement convenus). Bref mes rêves, c'est aujourd'hui de l'entertainment à 100%.

Je ne m'imagine pas ne pas rêver. Chaque matin je me souviens au moins de bribes de mes rêves, et parfois dans la journée d'autres éléments me reviennent. En tous cas la plupart du temps, je m'en souviens, ils sont devenus drôlement sympas et bien construits : normal, déformation de téléphage oblige.

Lorsque j'étais au collège, mon ex-meilleure amie et moi nous racontions nos rêves le matin en allant en cours. Nous essayions de les comprendre. Nous dénichions des ouvrages dans lesquels nous lisions des significations qui ne voulaient rien dire pour nous. Nous cherchions quelque chose dans nos rêves. Pendant toute cette époque et de temps à autres encore maintenant, je pensais que les miens avaient une certaine magie dans le sens où je les croyais prémonitoires : leur construction était si linéaire que ça semblait évident ; s'ils ne transcrivaient pas le passé, alors il ne restait que le futur. A l'heure actuelle je crois plutôt à une façon qu'a mon subconscient de me communiquer quelque chose de vital que je doive comprendre. En tous cas depuis cette époque et peut-être même un peu avant, je leur accorde une grande importance. Ca fait partie de ma vie intérieure que d'accorder quelques minutes en me levant ou en me couchant, à ces petits messages étranges.

Je n'ai jamais compris comment on peut ne pas rêver. Ou ne pas se souvenir, ce qui revient au même. Chose que mon ex m'avait apprise : on n'a visiblement pas tous les mêmes vies intérieures. Je l'ignorais il n'y a pas si longtemps. J'ai aussi appris que certains font des rêves particulièrement explicites, ce qui ne m'est jamais arrivé. Mes rêves, toujours très hollywoodiens, ne montrent jamais rien de trop sexuel, ils suggèrent, dans le meilleur des cas. Un peu comme lorsque deux personnages d'un film se retrouvent au lit, leurs lèvres prêtes à s'embras(s)er mais à quelques centimètres encore, et qu'on a immédiatement une ellipse temporelle qui nous conduit à l'irrémédiable allumage de cigarette post-coïtale. Bref, apparemment, mes rêves ne ressemblent à ceux d'aucun autre, quoi que jamais ça ne s'infirmera ni ne se confirmera, et pour cause.

Celui de la nuit dernière m'a beaucoup marquée. D'ordinaire je ne consacre qu'une minute ou deux au rêve de la veille, histoire de me rappeler de quoi ça cause, s'il se passait quelque chose qui mérite réflexion ou qui m'a particulièrement émue (comme ça m'est arrivé en janvier dernier) et point barre. Et puis une fois de temps en temps c'est vraiment marquant et je ne parviens pas à me détacher certaines images de la tête.

Nous étions une trentaine de filles. Une unité d'élite. Pourquoi que des filles ? Je l'ignore. Et encore moins pourquoi nos uniformes étaient rose fushia alors que ce n'est vraiment pas le type de couleurs dont je raffole. C'est un point de détail (quoique, dans les rêves, on ne sait jamais ce qui est détail...) Surentraînées. On attendait beaucoup de nous. Trente nanas prêtes à mourir. C'était ce dont j'étais consciente tout le long de ce rêve : la mort. Nous voilà en train d'embarquer dans notre navire spacial (un peu de SF, c'est bien connu, permet de merveilleuses métaphores, pas étonnant que les rêves soient friands de SF et de fantastique) avec des instructions claires : nous enfermer dans nos "capsules" (en réalité des sortes de placards, pas vraiment conçus pour l'hibernation, non plus qu'ils n'offraient de spéciale protection en fait, juste des caisons pour que nous nous rangions) et attendre d'arriver à un certain temps de vol avant d'en sortir et de nous battre. C'est une fois en phase de combat que les caissons se montraient réellement utiles : celles qui mourraient devaient aller s'y glisser et y finir leur vie. Et beaucoup d'entre nous mourraient, bien que je n'aie jamais vu l'ennemi, et que nous ne soyions jamais sorties de la navette (mais les rêves s'accomodent volontiers de l'absence d'explications).

Persistance du souvenir des caissons dans mon esprit depuis ce matin : tandis que mes camarades s'y glissaient afin d'y pousser leur dernier souffle, j'entends encore l'explication de notre supérieur nous expliquant que cet appareil récupère en fait nos restes biologiques pour les greffer éventuellement à celles d'entre nous qui seraient blessées. Recyclant ainsi notre sang, et surtout nos organes. Des viscères, des os, et du sang. Tout cela comme en train de fondre pour être redistribué, absorbé par le fond du coffre à taille humaine, ne laissant rien. Telle est la vision qui me hante depuis ce matin, dans l'écrin blanc et propre du caisson chirurgical.

Vision doublée d'une double sensation, qui était la mienne au moment du rêve et qui perdure encore lorsque l'image me revient : à la fois la peur (pas une impression de peur mais bien la peur elle-même, crispante et glaciale) et une sorte de sérénité assez difficile à décrire. Un soulagement à l'idée de mourir mais pas en vain. Que quelque chose survive : la cause. L'idée de faire le bien même en mourrant. C'est très déconcertant.

Chose plus étrange encore, la scène s'est reproduite trois fois. Comme en rembobinant le rêve pour mieux l'exécuter la fois suivante. Il ne s'est pas répété identiquement à chaque fois : je n'occupais pas forcément de capsule à la même place dans le navire, ou encore je ne me battais pas au même poste. Mais arrivée à un certain point de la bataille, l'histoire s'arrêtait et reprenait à son commencement : le moment exact de la fin de l'entraînement où on nous faisait monter dans le vaisseau impeccablement blanc en nous expliquant son fonctionnement. Puis nous montions, nous enfermions dans les capsules... etc.

Mais ce qui me déconcerte le plus, ce n'est pas tant d'avoir vu tout cela, non, beaucoup de mes rêves revêtent une certaine violence physique et/ou morale, et la répétitivité n'est pas si rare.

C'est surtout d'avoir eu cette image gravée dans mon cortex toute la journée, telle une expérience vivace et réelle : j'ai fini le rêve avec ce paisible sentiment mêlé d'horreur, les yeux rivés sur l'intérieur de mon caisson...

29 août 2005

Elle ignore...

J'ai laissé le téléphone sonner. Pourtant j'ai bien vu qui m'appelait. Je sais qu'elle a laissé un message. Je sais aussi que je ne la rappellerai pas. Et en entendant le message, je me rappelle pourquoi.

Parfois, moi aussi, je fais partie de ceux qui ne reviennent jamais...

A intervalles réguliers, c'en est effrayant, elle me rappelle. Et, affichage du numéro oblige, elle tombe irrémédiablement sur mon répondeur. Auquel elle dispense quelques nouvelles sans même savoir si ça m'intéresse, ou si même j'aurai le message. En fait depuis près de deux ans que cela dure, on pourrait penser qu'elle laisserait tomber. C'était ce que je m'étais imaginé au début d'ailleurs. Elle ignore que j'écoute ses messages avec intérêt, mais qu'ils me donnent chaque fois envie de ne pas la rappeler.

Cela fait deux ans que nous ne nous sommes pas parlées réellement, et plus de trois que nous ne nous sommes pas vues ; plus, si ça se trouve. Je me souviens de la crèperie ; je ne suis pas sûre qu'il y ait eu une autre fois. A cette époque déjà j'avais hésité à la voir. Pour les mêmes raisons qu'aujourd'hui je ne le veux plus du tout. Elle ignore qu'à chacun de ses appels elle me tord le coeur.

Dans ses messages, elle laisse toujours la porte ouverte à des retrouvailles. Il lui est déjà arrivé de me donner directement ses dates de disponibilité ; cette fois elle me fait savoir ses dates d'indisponibilités, pour aller au plus court. En général elle espère une rencontre, pas seulement un coup de fil. Je la pense incapable de comprendre. Elle ignore qu'elle m'a toujours donné l'impression de n'avoir jamais compris.

Lorsqu'on est au lycée, j'imagine, on pense que ce sera pour la vie. Que les amitiés vont rester. D'ailleurs nous étions convaincues de travailler toutes ensemble dans 10 ans. Nous en avions fait le pacte. Même si elles l'avaient signé en rigolant et qu'aujourd'hui c'est moi qui prends le parti d'en rire plutôt qu'autre chose, avec un léger goût amer, peut-être. Malheureusement elle est aussi arrivée dans ma vie à un moment où je ne croyais déjà plus qu'à moitié à l'amitié. J'avais toujours écrit ce mot avec un "A" majuscule, mais après la troisième... cette fichue année de troisième où tout est allé de travers dans tout ce qui importait réellement... je n'y croyais déjà plus vraiment. Je courais déjà après quelque chose en quoi je ne croyais plus ; j'allais ensuite apprendre que ce ne serait pas la dernière fois, hélas. Pourtant après cette période, elle a été ce qui s'est le plus rapproché d'une meilleure amie pour moi. Et même quand je n'y croyais plus tant, j'avais tendance à une certaine possessivité. Elle l'ignore sans doute, mais devant son diminutif, j'avais tendance à mettre un possessif, d'ailleurs (ça faisait aussi un joli jeu de mot, il faut le dire, et il lui allait bien : drôle et doux).

Je me rappelle plus ou moins comment les choses ont commencé : alors qu'en seconde nous avions chacune une camarade de notre côté, nos deux binômes s'étaient liées d'amitié et nous avaient brutalement prises en grippe. Nous avions laissé tomber les deux pestes et commencé à traîner ensemble. Sans savoir qu'en deux ans, nous serions la base d'un véritable clan. A cette époque je m'étais dégagée de certaines peurs en milieu scolaire. J'étais libre. Je plaisantais. Je brillais. J'écrivais, je dessinais, je faisais le pitre. Et pendant ce temps, elle était l'incarnation de la douceur, de la gentillesse, de la tempérance, et à nous deux nous sommes devenues les pilliers d'une petite troupe de rigolottes en tous genres qui variaient en trois formations à géométrie plus ou moins fixe, et dont nous étions le point de ralliement pendant ces années de lycée... C'était une époque où on était, chacune à notre façon, les deux chefs de meute. J'en faisais des tonnes et quand les filles avaient besoin de calme, elles allaient à elle. Je faisais l'animation, en quelques sortes. J'aimais ça. J'aimais les avoir toutes les 10 autour de moi lorsque je leur lisais mes écrits, ou les voir éplucher mes derniers dessins. Je n'écrivais parfois que pour cela (mais qui se souvient encore des CorotGirls ?), juste pour les voir rire à mes singeries, les réunir autour d'un cérémonial que je passais parfois toute une nuit à mettre au point, juste pour que cex 10-là soient encore là la semaine suivante ; et à côté, toujours, toujours elle était là, en train de hocher la tête en riant, sur l'air de "c'est drôle mais t'en rates pas une, petit clown". Elle ignore que ça m'était si important.

C'était une drôle de relation et même si je ne considérais pas vraiment qu'elle était une meilleure amie comme on l'entend à cette période, je ne m'imaginais pas faire mes pitreries sans elle (l'avenir m'a détrompée, bien-sûr, et je l'ai laissé faire). Elle servait de point d'équilibre. Je me suis souvent demandée si ensuite j'aurais pu changer de rôle. Tout ce beau monde avait vite fait de prendre de la distance lorsque j'étais sérieuse. Je me souviens comment je leur ai dit ce qui se passait à la maison. Je me souviens le silence. J'ai encore dans un carton les dessins que j'ai faits ensuite pour les distraire. C'était aussi ça, ma vie avec ces filles. Et même si elle y prêtait un peu plus d'attention que les autres, il fallait toujours que j'essaye de tourner les choses avec humour. Ou comment, pour parler de mes teenageries, j'avais dû inventer un jeu sur "l'homme-concept idéal" par le biais duquel, en philo, je lui demandais son avis... C'était comme ça. Est-ce que j'ai jamais pleuré devant elle ? C'est possible. Sans doute pas très longtemps en tous cas. Elle ignore que j'ai encore tout gardé quelque part et que je trimballe nos conneries de lycée de déménagement en déménagement.

Et que ça en fait du papier, diable !

Tout ce qui m'attirait à elle à cette époque, la raison pour laquelle je la fréquentais et estimais qu'elle était un peu un sorte de contre-poids, c'est l'exacte raison pour laquelle je ne veux surtout pas la revoir aujourd'hui. Parce qu'elle me faisait mal rien que d'exister, dans le fond. Tout lui semblait toujours si simple. Mais à l'époque les choses étaient moins dures ; à l'époque je n'avais même qu'à moitié conscience de ce qui me faisais mal. Je n'ai compris qu'en cours de route combien mes parents m'étaient nocifs. Et quand les choses ont vraiment commencé à me faire mal explicitement, j'avais déjà le Bac en poche, j'avais fini le lycée, et toutes ces choses que vous savez si vous avez lu mes premiers posts. C'est à ce moment que j'ai voulu rompre le contact. D'abord parce que, j'en étais convaincue, on ne garde que certains types d'amis indéfiniment : ceux auxquels on a pas peur de s'ouvrir. Mais je m'étais bâtie auprès d'elle et des autres une telle image qu'au moment de ma dépression, j'ai senti qu'elles ne tiendraient pas. Et quand je leur ai donné des nouvelles, au début, j'ai bien vu que c'étaient des soucis d'un autre gabarit que celui qu'elles pouvaient supporter, elle y compris. Alors j'ai voulu couper net. Et ça faisait mal de la voir s'accrocher. Parce qu'elle ignorait pourquoi tout en l'adorant toujours autant, je la détestait...

Depuis des années, elle est l'incarnation pour moi de ce que je ne connaitrai jamais. J'ai encore en mémoire, comme si je l'avais visitée hier, le souvenir du jour où elle m'a invitée à déjeuner chez elle. Je vois la télé allumée devant la table du living, la petite cuisine blanche, le poupon joufflu dont elle aurait presque pu être la mère puisqu'ils avaient 16 ans de différence, la petite soeur au quenottes adorables, sa mère aux sourcils bien épilés, le beau-père qui la traitait plus en copine qu'en fille et le chat aux yeux lumineux. Une famille moderne : recomposée. Mais heureuse. Terriblement heureuse. Terriblement simple. Elle ne comprenait jamais mes questions, toutes mes questions, les questions que je me posais en permanence et qui avec le temps ne se sont qu'à peine calmées, et en voyant la nappe cirée aux couleurs chaleureuses et le canapé tout affaissé, j'ai compris pourquoi. Parce que sa vie était simple et sans question. Parce qu'on ne se pose pas tant de question quand ça va. Et ça allait. Plus que bien. Et tout semblait naturel. Elle devenait une jeune femme épanouie sans même avoir à en faire l'effort. Un beau matin de septembre, elle nous était revenue de vacances, nouvelle coupe, nouvelle couleur, lentilles de contact et maquillage délicat : elle avait grandi, juste comme ça. Et ça n'a plus arrêté. Et ça semblait naturel et normal et moi je ramais intensément pour m'améliorer. Je devais ruser pour m'accorder un peu de temps dans la salle de bains ; sa mère lui payait le coiffeur régulièrement. Je passais mes soirées à avoir peur ; elle planifiait des soirées cassette video ou pouponnage du frérot. Lorsque ce dernier est né, c'était un bonheur ; lorsque je devais passer un week end chez mes grands-parents, j'en étais malade à l'avance et patraque pour une semaine au retour. Elle passait ses vacances en famille en Bretagne chez ses grands-parents qui l'avaient élevée pendant une période difficile de sa mère ; c'était la pire des corvées que de devoir être passée au crible par ma propre famille et n'allais voir ma grand'mère que de plus en plus succintement. Avec le temps elle s'est trouvé un copain charmant, puis a rompu sans scandale, s'en est trouvé un autre, et ne l'a plus quitté. Aujourd'hui elle m'annonce au téléphone qu'elle part s'installer avec lui en Nouvelle-Calédonie, après des années d'études fructueuses et épanouies, après des années à me détailler par le menu ses joies, mais jamais de peine. Tout évoluant toujours dans le bon sens. C'est sûr que sur un message répondeur de 30s à 1mn, elle ne va pas me confier ses pires problèmes, mais globalement, elle avance dans la vie, c'est net. Elle ignore à quel point la jalousie du début s'est juste transformée en profond sentiment d'injustice impossible à renverser.

Chaque fois qu'elle appelle, je me dis qu'à la rigueur, je la recontacterai quand les choses iront mieux pour moi. C'est ce que je me suis dit la première fois "je suis en dépression, je viens de faire une tentative de suicide, qu'ai-je à lui dire ? Je la rappellerai une autre fois. A la prochaine bonne nouvelle". Mais il n'y a pas de bonne nouvelle suivante et quand je l'entends au téléphone cocher petit-à-petit sans le savoir chaque ligne de ma liste mentale des choses à réussir dans la vie, je compare et je me dis que je ne peux rien lui répondre. Et plus elle me semble heureuse, plus je vois combien je ne le suis pas, et n'ai envie ni d'attiser sa pitié, ni de l'attrister à mon sujet. Alors j'écoute ses bonnes nouvelles, me réjouit un quart de seconde pour elle, et reviens à la réalité : je n'ai rien à lui dire de probant. Elle se dit peut-être que je vais tellement bien que je l'ai oubliée. Elle se dit peut-être qu'elle a fait quelque chose de mal et que je ne vais pas la rappeler parce que je boude. Elle se dit peut-être que la tête de linotte que je suis a encore oublié de la recontacter. Mais elle ignore que je ne veux pas nous mettre l'une face à l'autre et lui donner à voir tout ce que je ne suis pas devenue, non plus que je ne tiens à voir combien elle s'épanouit...

Ca me fait mal. Ca me fait mal de l'entendre dire que tout va bien depuis près de 5 ans avec son copain tandis que le mien m'a foutue dehors (d'autant que nous les avons rencontrés presqu'en même temps, le parallèle n'en est que plus douloureux). Ca me fait mal d'entendre ses diplômes tandis que je n'arrive pas à survivre avec les miens. L'entendre parler de sa voiture, de leur appart, de leur déménagement, de sa famille, de sa famille à lui, de tout ce qui est normal à 23 ans et que je n'ai pas. Surtout, surtout qu'elle ignore que je n'ai pas tout ça.

Et qu'elle s'accroche comme ça, de loin en loin, c'est pire. Je voudrais qu'elle accepte. Mais son amitié et la mienne sont trop fortes pour qu'on s'oublie, visiblement. Elle ignore que je pense à elle très régulièrement, bien plus régulièrement encore qu'elle ne m'appelle. Qu'elle est mon échelle de mesure sur la réussite dans la vie, sur ce que sont une famille réussie, une scolarité réussie, une vie sociale réussie, une vie professionnelle réussie, une relation réussie. Elle ignore tout cela et c'est justement aussi cela que je lui envie. Sa faculté à ne pas comprendre tout ce qui me tord. Elle ignore que du temps de ma thérapie, il y a fort longtemps maintenant, je parlais d'elle et ma psy m'a rétorqué "mais ça n'existe pas, les gens comme ça, vous vous faites des idées -d'ailleurs, ça n'existe pas, les gens" Mais si ! Et c'est bien ce qui m'empêche de la rappeler ! C'est que loin de la vision idyllique des séries télé que j'affectionne tant, j'en ai vue une, en vrai, je pensais très méchamment, au lycée, qu'elle se ferait manger la laine sur le dos une fois sortie du lycée, mais non ! C'est elle, elle et tous les gens qui lui ressemblent, qui s'en sortent ! Si ça existe, les gens comme elle, et c'est ce qui me fait mal dans mon malheur, c'est que je pourrais penser que tout le monde est malheureux, mais depuis des années quand je la regarde, je vois que c'est faux, que tout ne va pas forcément mal, et que c'est moi qui m'enfonce. Et ça elle l'ignore et j'ai envie que ça continue.

Parce que, si ça me fait mal, c'est parce qu'avant tout c'est face à moi-même qu'elle me met...

Elle ignore tout cela, et plus encore. Et j'imagine qu'elle ignore l'existence de ce blog et, à vrai dire, c'est à la fois un profond soulagement... et une douleur.

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30 août 2005

Maudit modem

Après une disparition du net d'une semaine et demie qui m'a valu moults mails inquiets (alors que vous devriez vous douter, depuis le temps, qu'entre les déménagements et ma guigne légendaire, il y a forcément une bonne raison à mes absences de la toile), me revoilà, et comme à l'accoutumée, c'est quand on a pas le blog sous la main qu'on a envie d'y écrire.

Voici donc deux notes antidatées par mes soins :

- Recyclage
- Elle ignore...

Je sais que ça signifie beaucoup de lecture, mais vous verrez, les yeux se réhabituent vite à lire plus de trois mots à la suite.

26 octobre 2005

Gentil harcèlement

Arrêtez de vouloir me parler. Ca va bien maintenant.

On sait tous que les mots, j'aime ça. Mais en ce moment, gardez-les pour vous, parce qu'un mot, c'est vide, c'est creux, et surtout ça ne se mange pas. Ca ne paye pas les factures qui continuent d'arriver comme si de rien n'était. Ca ne remplace pas une rentrée d'argent. Et quand vous avances que ça pourrait, c'est encore plus ignoble de dire des mots dont on ne se rend pas compte ce qu'ils coûtent à entendre. Arrêtez de me proposer des solutions qui n'en sont pas. Je ne vais pas aller quémander auprès de mes amis, de toutes façons, le mois prochain, et le mois d'après, ce sera strictement la même chose. Si mois d'après il y a.

Arrêtez de vouloir me parler parce que je n'ai pas envie de devoir faire semblant. Parce qu'au téléphone, le réflexe est le plus fort et que je me retrouve à faire semblant même si je n'ai pas envie. Juste parce que ça fait des années que dés que les gens me parlent, je les rassure. Je les rassure sur le fait que le monde n'est pas si mal foutu. Sur le fait que je suis de celles qui savent garder le sourire. Sur le fait qu'ils sont les plus à plaindre, parce qu'on a toujours envie de passer pour le plus à plaindre de la bande, parce que nos problèmes sont toujours plus gros, et plus douloureux, et plus compliqués que ceux des autres. Non, je n'ai pas envie d'entendre les vôtre non plus. J'ai envie de vivre les dernières semaines de ce sursis, ou les derniers jours je ne sais pas encore comment ça va se calculer, sans que les gens me parlent.

Parce que dans une voix on entend toujours la pitié. Dans des mots, moins.

Je sais bien qu'ils sont chargés de bonnes intentions, ces gens qui voudraient m'appeler, me parler, entendre ma voix pour être sûrs que tout va bien, mais je ne vais pas bien, voilà tout, et je n'ai pas envie de me plaindre au téléphone comme je le faisais il y a quelques années quand ça n'allait déjà pas (mais que ça allait quand même mieux qu'aujourd'hui). Je n'ai pas envie de mots, de paroles, d'entendre certaines choses certainement, d'en dire d'autres.

Je n'ai même pas envie de les écrire mais après plusieurs semaines de blakcout, il fallait quand même que je vois prévienne : je ne supporte plus quiconque veut me parler.

Sans aucun rapport avec mon amitié ou non pour ces gens-là, d'ailleurs.

22 février 2006

Et ça ne s'arrange pas avec le temps...

Je me demande si on peut vraiment choisir son mode de vie. On est vraisemblablement obligés de se calquer sur un même modèle de style de vie. Aller au travail, revenir du travail. Been there. Done that. Et puis finalement j'en ai de moins en moins envie. J'ai en tête l'idéal de ceux qui choisissaient de vivre seuls, il y a quelques siècles, et qui pouvaient le faire, tranquillement.

Aujourd'hui c'est simplement impossible si on veut manger. Lorsque les recherches d'emploi ne donnent rien, une journée de plus, je me prends à rêver que je vais me terrer dans une petite maison quelque part loin (pas besoin d'un palace, juste ce que j'ai ici, mais loin de tous), avec pour seul soucis d'aller faire mes courses tous les 30 du mois et de rester seule, au calme, le reste du temps (je cracherais pas sur une connexion internet, faut bien dire, mais bon, pas de gens).

Mais qui peut encore faire ce choix de vie ? Personne n'arrive plus à vivre réellement seul maintenant. On est obligés de voir du monde, on est obligés d'avoir tous le même genre de travail. On est tous obligés de choisir de faire comme tout le monde. Il n'y a plus de vie en solitaire. Les ermites n'ont qu'à ravaler leur besoin de solitude. D'ailleurs de nos jours, est-ce que qui que ce soit arrive à vivre selon ses besoins ? Ceux qui ont besoin de contacts se retrouvent désespérément seuls, ceux qui ont besoin de solitude ne peuvent l'obtenir. Pas étonnant qu'on reporte notre attention sur les possessions matérielles dans ces conditions, ça au moins, on sait comment se fournir.
Il y a des magasins de choses partout, mais pas de magasins de gens (on rapporterait ceux dont on ne veut plus, on ferait du troc pour voir de nouveaux visages, on s'offrirait un nouvel ami pour les grandes occasions...). C'est plus facile. On peut choisir ce qu'on a, pas ceux avec qui on est ou n'est pas.

Est-ce qu'il existe encore des gens qui vivent différemment de la "norme" dans un pays comme la France ? Bien-sûr dans d'autres cultures, j'imagine que ce n'est pas si difficile de ne pas aller travailler en ville tous les jours. Mais en France, tout le monde suit le même modèle, non ? Tout le monde est obligé de s'accomoder de cette façon de vivre.

Et à mesure que le temps passe, le besoin de solitude extrême s'intensifie... jusqu'au point où j'en suis à me demander si chercher un travail ne va pas finalement me réduire à faire une croix sur ma si chère solitude.

Dans le fond, le chômage me permet d'avoir une avance sur tous ceux qui voudraient être seuls mais doivent tous les jours aller au boulot. J'ai de la chance dans mon malheur.

1 mars 2006

Ma grand'mère va mourir

Quand on est la petite-fille de quelqu'un, on grandit avec l'idée que ces personnes partiront avant nous. En ce qui me concerne, je ne me rappelle pas d'une époque où il n'aurait pas été clair pour moi que je perdrais mes grands-parents un jour. Le plus dur c'est de penser qu'à ce moment-là, mes parents perdront leurs propres parents. Et là ça me rapproche du moment où je serai orpheline. Mais c'est encore loin. Et même ça, c'est tout-à-fait concevable pour moi. Je ne prétends pas que je m'en sortirai sans un bleu, sans une larme, mais je me suis, en quelques sortes, faite à cette idée. Peut-être aussi que lorsqu'on a passé plusieurs années de sa vie à songer, penser, voire envisager la mort, on voit les choses autrement. On y passe tous un jour, je ne peux pas lutter contre cette réalité et d'ailleurs je n'essaye pas. Je ne suis pas de ceux qui espèrent vaguement que certains êtres chers seront éternels. Je ne suis pas comme mon père, qui refuse cette idée. Je ne suis pas vraiment surprise, quand ma mère commence à dire "il vaut mieux qu'elle commence à voir des gens avant que..."

Mais voilà, ma grand'mère va mourir. Elle est là, dans ce lit d'hôpital, elle regarde le plafond. Elle n'écoute plus les médecins. Je me demande si ça vaut la peine de les écouter dans le fond. Elle attend.

J'imagine ma mère, qui prend sa voiture tous les soirs. Comment elle serre le frein à main lentement, très lentement, avant de prendre son sac et sortir de la voiture. Le léger soupir qu'elle retient avant de pousser la porte de la chambre. La façon dont elle crispe bien fort ses mains sur la lanière de son sac... ses mains en peau de poulet qui disent qu'elle va par là, elle aussi, ses mains qui me font mal. Comment elle crispe la mâchoire comme elle fait lorsqu'elle est impuissante. Comment elle ferme les yeux devant son volant avant de tourner la clé de contact au retour. La façon dont elle garde le silence plus encore que d'habitude, ensuite.

La façon dont elle est seule. Dont elle est déjà seule.

Moi, je ne l'ai pas encore vue, ma grand'mère. Je ne l'ai pas vu depuis qu'on a "fêté" mon anniversaire. Déjà là, ça n'allait pas fort. Mais les vieux, ils ne vont jamais fort. J'avais bien remarqué que c'était pas la grande forme, mais je n'ai pas fait attention. Je ne me le reproche pas. Ma grand'mère et moi, ça n'est plus ce que c'était. Déjà avant de cohabiter ensemble ça n'était plus ce que c'était, alors après ces six mois passés l'une à supporter la différence de l'autre, on s'est encore plus éloignées sous ce toit. Elle ne comprend plus la personne que je suis. Et je ne comprends pas comment elle a pu changer autant.

Vous auriez du la connaître il y a quelques années. C'était vraiment une grand'mère géniale. Ce n'était pas tant le fait de m'emmener en vacances (quoique rien que m'éloigner de la maison, c'était déjà miraculeux), c'était d'écouter. Quand j'étais plus jeune, je pouvais lui parler de tout. Pendant le lycée, j'allais la voir le lundi midi. Elle cuisinait pour douze et je finissais quand même les plats. Et je lui parlais de tout ce qui ne se disait pas à la maison. Je lui parlais de mes amies. De mes rires. De mes passions, un peu. Elle écoutait. Et surtout, elle parlait. Inlassablement et pendant des heures, elle racontait tout ce qui était elle. Je l'ai écouté au moins pendant la moitié de ma vie, c'est sûr. Je connais ces histoires par coeur. Il faut bien. Un jour c'est moi qui les raconterai.

Vous auriez du la connaître. Bien-sûr vous ne pouviez pas. Plus personne ne pourra. Ne verra la colère dans ses yeux gris en repensant à ses indignations passées. Ne verra les joues de couperose se gonfler en racontant quelques bêtises qui n'étaient pas vraiment drôles, mais on s'en fiche.

La petite fille en moi ne la voit plus depuis longtemps. La grande ne la voyait pas très souvent depuis que j'avais déménagé. Mais maintenant...

Je me réveille le matin depuis deux semaines en me disant que c'est aujourd'hui. Que quelqu'un va m'appeler. Et s'ils ne le faisaient pas ? Tous les deux jours, c'est moi qui appelle. Ca ne s'arrange pas, mais on n'y est pas. Je ne me couche pas. Ou trop tôt. Ils vont appeler ce soir, c'est sûr. Ou tôt le matin ? En plein après-midi ? Et si j'éteignais le téléphone ? Au moment où j'écris, ça se trouve... qui sait ?

C'est comme cette chanson.

L'an dernier, j'avais rêvé de ma grand'mère. L'autre. Juste avant d'être réveillée par un de ces fameux coups de fil. C'est quelque chose à quoi j'essaye de ne pas penser, depuis un an, parce que, j'ai beau savoir que mes rêves m'envoient des messages, je n'aime pas me rappeler de la seule fois où ils ont eu raison. Après, pour ne pas croire aux rêves prémonitoires... Est-ce que je vais me prévenir à l'avance cette fois ? Est-ce que mon subconscient me le rendra supportable ? Au moins quelques minutes de plus ? Est-ce que je vais réussir à bien le gérer en plus du reste ?

Dans le fond, bien-sûr que je vais y survivre. Ce n'est pas comme si on me donnait le choix. Et ce n'est pas comme si je ne savais pas ce qui se passe. Dans un jour, une semaine ou un mois, ou un an, bien-sûr que je sais que ça arrivera. Mais c'est l'attente, vous comprenez ?

Voilà. Ma grand'mère va mourir.

6 mars 2006

Seule

Elle va mourir seule. A l'hôpital, on a demandé à ma mère si elle souhaitait ou non être appelée de nuit pour être prévenue, si jamais ça n'arrive pas pendant la journée. Sinon, on l'appellera au petite matin. "On la garde jusqu'à 8h", fait l'infirmière d'un ton qui se veut rassurant.

Je n'arrive pas à croire ça. Non seulement qu'elle en parle sans aucune retenue à trois pas à peine de la chambre (après, étonnez-vous qu'elle n'ait pas envie de se battre ! tout le monde parle déjà d'elle comme si elle était déjà morte !), mais surtout de ce que sous-entend cette proposition. Ma grand'mère va mourir, et elle va mourir seule. Et tout le monde trouve ça normal. Comme si, même, ce serait gênant. Ca prendrait trop de place.

Meurt dans ton coin, n'embête personne. Si on veut dormir, ne va pas vous faire réveiller ! Au petit déjeuner, on verra ça.

C'est donc un certitude, ma grand'mère va mourir seule. Sans douleur, mais seule. Oxymore.

Maintenant ils vous font des services très pratiques pour tout. On vous envoie un mail lorsque vos fleurs de la St Valentin sont arrivées (ne vous dérangez pas pour appeler l'élu de votre coeur, Interflora fait ça pour vous), on se fait envoyer un SMS par l'agence d'interim (c'est pas comme si chercher un emploi avait vraiment de l'importance !), et on vous appelle au petit déjeuner pour ne pas vous réveiller si votre mère meurt. C'est normal.

BORDEL DE MERDE : C'EST NORMAL.

25 mars 2006

Ce qui me manque

Rire du tour de force accompli par l'équipe du Président Bartlet, me retourner, et voir qu'il n'est pas là pour saluer l'effort avec moi. Il ne me manque que ces jours-là. Mais ces fois-là, c'est pas à moitié.

L'ami me manque. Je sais que je ne le retrouverai jamais. Je n'ai même pas envie d'essayer. Mais une fois de temps en temps, les bons souvenirs reviennent, et ce ne sont que des souvenirs. [soupir]

Je ne sais pas pourquoi je pense à lui depuis que ma grand'mère est morte. Ou plutôt je le devine, mais ne comprends pas que ce sentiment perdure. J'ai presqu'immédiatement pensé à lui ce soir-là. Je me suis dit qu'il savait sans doute ce que je ressentais. Mais surtout j'ai ressenti de la colère contre lui, j'ai pensé : "il l'avait rencontrée, lui, il a passé du temps avec elle", j'ai ressenti le besoin de lui faire me rendre les moments où il l'avait cotoyée. Comme si j'avais besoin de temps en extra avec elle, et qu'il devait me rembourser de ces moments-là. C'était stupide, mais la mort de ma grand'mère m'a fait penser à lui de cette façon.

Et depuis, une fois de temps en temps, je continue d'y penser. J'ai envie de jouer à un jeu video... c'est lui qui l'a gardé. Je regarde A la Maison Blanche... je ris et m'émeus seule. Je classe mes cassettes videos et tombe sur le final d'Angel... qu'est-ce qu'elle était bien cette autre saison qu'on avait regardé d'une traite, en moins d'une semaine ! Quelqu'un me parle de photos de moi, je dis que je n'en ai aucune récente de moins de 5 ou 6 ans... je me souviens soudain que je mens, il ya celles à EuroDisney. De petites choses.

Je n'ai pas été prise de l'envie de l'appeler depuis des mois et des mois. Peut-être même depuis un an. Je ne m'en soucie plus à un tel point, que je ne me souviens même plus de la dernière fois où j'ai eu un pincement au coeur en pensant à lui, alors que d'ordinaire je n'ai besoin de faire aucun effort pour me souvenir de ce type de choses, du moins tant qu'elles me hantent.

Je m'étonne chaque fois que je m'aperçois qu'il est venu sur mon blog, mais n'ai pas la moindre envie de lui envoyer un mail, même si dans ses commentaires, il laisse son adresse. Pas un seul instant il ne me viendrait l'idée de reprendre contact. Et puis je sais très bien que, quand bien même je le ferais, rien ne serait plus jamais comme alors. Et c'est l'ambiance d'alors qui me manque. Ce sont les coup de fils d'une heure ou deux le soir, à commencer à parler de choses sombres pour finalement parler de séries. Ce sont les rires et les échanges de vannes. Les conneries, quoi.

Pourtant, à la vérité, je n'ai pas très envie de voir des gens. J'ai deux ou trois noms qui me viennent à l'esprit, de personnes qui ne demandent qu'à avoir des relations moins superficielles avec moi. Il y a cette amie du lycée avec qui petit-à-petit je reprends contact. Cette autre que je snobe copieusement sans avoir le cran de lui expliquer pour moi (c'est comme ça, je préfère éviter d'expliquer frontalement et laisser les choses se tasser toutes seules). Cette membre de mon forum qui s'étonne que je ne sois pas plus causante avec elle en privé. Et puis aussi, bien-sûr...

Et il me convient parfaitement de rester à la surface des choses avec toutes ces personnes, et toutes les autres. Quel que soit le degré d'amitié que je ressente pour eux, je ne leur accorde qu'une place modérée dans ma vie, totalement par choix, et j'en suis ravie. A force d'ignorer des mails ou des coups de fil, de faire du silence radio à dose plus ou moins intensive, j'ai fini par obtenir la distance exacte à laquelle j'aspirais, et vais aspirer quelques temps encore, sans doute. Donc il ne me manque pas des amis. Ca va très bien pour moi de ce côté-là et c'est même un des rares qui me donne autant satisfaction en ce moment. Il ne me manque pas des amis, il me manque juste lui. Lui l'ami.

J'y repensais, un peu plus tôt, justement après avoir eu ce petit soupir pendant A la Maison Blanche, ce soupir de regret qui voulait dire "il aurait sans doute ri sur ce coup-là !".

Je me suis demandé à quoi ça rimait. Je me suis demandé ce que pouvaient bien signifier certaines autres choses...

Par exemple pourquoi venir sur mon blog alors qu'il voulait à tout prix m'effacer de sa vie ? Pourquoi faire l'effort de le chercher, de lire plusieurs posts (et Dieu sait que mes posts sont rarement courts !), et même de prendre des nouvelles de ma famille ? Il y a peut-être un an, peut-etre légèrement moins, je me serais faite des idées sur le sujet. Mais au jour d'aujourd'hui, c'est simplement au-delà de mes facultés de compréhension. Je l'ai effacé de ma vie ; pas de mon passé, ça c'est évident, même si je le voulais j'en serais incapable, il a fait partie de mon existence pendant 5 ans et je ne peux l'effacer ni l'oublier, mais en tous cas, il n'est plus dans mes pensées (à part depuis deux semaines, comme je le disais, mais le cas est un peu particulier, non ?) Je ne me demande pas ce qu'il fait, comment il va, s'il s'en sort, s'il lui arrive des trucs bien, ou quoi ou qu'est-ce, enfin tous les trucs que je me demandais presque tous les jours à son sujet, lorsque j'étais encore sous le choc de la rupture et de l'éloignement physique. Je ne rêve plus de lui, non plus. Ok pas vraiment, mais c'était aussi dans les deux dernières semaines, c'est un cas à part encore une fois. Mais en-dehors de ces deux dernières semaines, où j'ai quand même été émotivement très bousculée il faut bien le dire, vraiment, je ne m'intéresse plus à lui en aucune façon.

Alors que moi, quand la séparation s'est faite, je ne le voulais pas ! Lui qui a voulu cet éloignement, cet effacement même, comment ça se fait qu'il ressent le besoin, une fois de temps en temps, de venir voir comment je vais ? Est-ce que j'ai loupé un truc ? Est-ce que je dois penser que je suis une mauvaise personne pour ne plus me préoccuper de lui et de son devenir ? Suis-je sensée, je ne sais pas, moi, regarder les infos, voir qu'il se passe un truc à Nantes, et me demander comment il va, ou l'impact que ça a sur lui, ou je ne sais quoi d'autre ? Dieu du ciel, j'ignore même s'il s'est passé quoi que ce soit de spécial à Nantes ces derniers temps ! C'est pas comme ya un an où je pouvais même pas regarder la meteo sans penser à lui, on en est à mille lieues ! J'ai fait une croix dans ma vie de tous les jours. J'aurais pensé qu'il l'aurait faite avant moi. Dois-je comprendre que ça n'a pas été si facile pour lui de m'oublier ? Après tout qu'est-ce qui m'étonne, j'ai été dans sa vie le temps qu'il a été dans la mienne, si je ne peux l'effacer, sans doute que lui non plus, pas si facile apparemment, puisque moi-même j'ai encore des périodes, comme en ce moment, où je pense à lui. Et puis ça fait plusieurs semaines maintenant qu'il n'a rien posté sur mon blog, je ne vois pas pourquoi je me pose tant de questions.

Tout ça, c'est la faute à la série A la Maison Blanche. Je n'aurais jamais autant cogité si j'avais pas regardé ce foutu épisode cette nuit. Les questions se seraient estompées, de la même façon que la douleur d'avoir perdu Mémé s'est atténuée, déjà. Déjà...

Mais pourquoi ces deux-là sont-ils tellement liés dans mon esprit, que lorsque je perds l'un, je ne peux m'empêcher de penser à l'autre ?

On en est là. L'ami d'une autre vie me manque. Je ne le retrouverai jamais, je ne le cherche pas, mais il me manque. Comme ça. Depuis deux semaines. Peut-être encore un peu, et après je reviendrai certainement à la normale. Ca vaudrait mieux parce que je ne saurais vraiment pas interpréter ça, autrement.

6 août 2005

La douleur exquise...?

Ca fait cinq ans maintenant que cet épisode me traumatise.

La première fois que je l'ai vu, j'en ai pleuré toutes les larmes de mon corps. Je l'ai trouvé terrifiant. La froideur avec laquelle l'histoire se termine. L'éloignement, palpable et dur. Et trois jours plus tard, mon petit ami de l'époque téléphonait pour rompre. Tout ce que j'avais reconnu dans l'épisode s'était concrétisé jusqu'au bout.

Depuis je sais très bien que cet épisode me fera pleurer. Pendant les deux années qui ont suivi, je pleurais pour une bonne moitié à cause de l'entremêlage entre fiction et réalité, parce que cet épisode, c'était un moment de mon histoire dont je ne m'étais pas détachée. Et puis ensuite, les années suivantes, je l'ai regardé comme un épisode qui fait pleurer.

J'ai une liste mentale des épisodes qui me font pleurer. Parce qu'il y a environ 10 ans, j'ai fait une monumentale découverte : pleurer devant un épisode, c'est bien. C'est meilleur que pleurer tout court. Je préfère me donner une raison de pleurer plutôt que d'avouer que j'en ai vraiment une. Et c'est tout aussi bien d'avoir une excuse, finalement. On peut pleurer devant autrui sans s'expliquer : c'est la faute des personnages, c'est la faute du scénario. Ca fait du bien d'avoir quelque chose qui brise la carapace. J'ai fait cette découverte et je l'ai trouvée non seulement pratique mais élégante. S'armer d'un paquet de kleenex, se lancer un épisode dont on sait qu'il va marcher, et se laisser aller quelques minutes. Et se sentir libérée, prête à repartir. Prête à réaffronter tout ce qui fait que, sans cet épisode, on aurait tout de même pleuré, sans doute dans le noir, sans doute dans le silence, sans doute en s'essuyant les joues dans un oreiller ou sur le ventre d'un ours en peluche anonyme. C'est pratique, c'est élégant, c'est libérateur...

Mais ce soir, j'ai été prise par surprise. Depuis combien de temps n'avais-je pas vu cet épisode ? Précisément celui-là, celui avec lequel j'ai cette sorte d'histoire ?

Parce que de tous les épisodes (et ils sont, tout au plus, une quinzaine) listés dans mon énumération mentale de parfaits ressorts dramatiques, celui-ci tranche parmi les autres : il n'y en a qu'un dans lequel je me sois jamais reconnue, de près ou de loin.

Et soudain, je regarde tranquillement la télé, papote avec un copain par mails, m'occupe de mon site, prépare mon week end festif... et cet épisode s'annonce. Je vois son titre, sur cet écran noir, et je me dis... "non". Pas celui-là. Surtout pas. J'étais si joyeuse. Si légère ! Depuis combien de temps ne m'étais-je pas sentie comme cela ? Pas celui-là.

Mais plutôt que d'éteindre, j'ai cédé. Celui-là, c'est mon épisode. Alors je l'ai regardé. Et malgré toutes ses rediffusions, malgré le fait que je l'aie vu tant de fois en DVD, en VO, en VOSTT, en VF... je m'y reconnais une fois de plus et le regarde avec un oeil nouveau.

Parce que cette distance, cette froideur, ces dialogues, même : il y a un an j'étais en plein dedans. Et jamais les épais sourcils de Big ne m'ont semblé si familiers.

Et naturellement, à la fin, je suis en larmes. Complètement surprise par ce que j'ai vu. Par ce que j'ai encore ressenti. Je suis émue aux larmes par un épisode qui n'en finit pas d'être écrit pour moi.

Une fois que tout a été fini (vraiment tout), j'ai passé dix bonnes minutes à pleurer. Les larmes venaient de loin. J'ai réalisé que ça faisait des mois que je n'avais pas pleuré. Ni pour moi, ni sous le couvert d'une quelconque fiction. Plus du tout. Et que ça avait besoin de sortir. Et que j'avais tout retenu en moi, que malgré ce que je pensais, je n'allais pas mieux, je me distrayais juste l'esprit par d'autres pensées.

Je n'ai plus mal à cuase d'un il, j'ai mal à cause de tous les ils, j'ai mal à cause des souvenirs que j'avais tant bien que mal occultés. Avais-je tourné la page ou juste détourné le regard ? Je ne suis plus très sûre. Mais j'avais tellement besoin de pleurer...

Mais dans le fond, j'aurais pu l'éteindre, cette télévision, non ? Je pourrais le reste du temps ne pas mettre en route d'épisode de ma liste. Je pourrais décider d'oublier ma liste. Faire comme tous ces gens qui s'arrangent pour ne pas penser à ce qui leur fait mal.

Moi aussi, j'ai la douleur exquise, quelque part...

9 avril 2006

La promesse de Koharu

Koharu est une idol. Elle a le sourire légèrement de travers, de grands yeux rieurs, et une frimousse qui compte bien embellir encore avec les années.

Elle a commencé à travailler dans le showbiz il y a presqu'un an maintenant. Depuis elle a sortie des singles au sein d'un groupe, et même un toute seule, récemment. Elle a déjà plusieurs dizaines de concerts à son actif, et tout un tas d'activités aussi exaltantes que d'être prise en photo, répéter une comédie musicale, chanter le générique d'une série colorée ou encore se produire dans des émissions de divertissement.

Des milliers de jeunes filles la regardent, une bonne partie l'envie sans doute. Elle ne porte jamais deux fois les mêmes fringues, se fait coiffer et maquiller presque tous les jours, rencontre des gens passionnants et est la nouvelle égérie de son patron qui lui trouve tout un tas de contrats pour la mettre en valeur.

Koharu travaille beaucoup, je ne vous le cacherai pas. C'est fatigant et elle n'a pas beaucoup de temps pour sa vie à elle ; il y a aussi les études à se préoccuper, les copines avec lesquelles elle voudrait bien ne pas perdre contact, et puis sa famille qu'elle ne voit plus aussi souvent que, par exemple, il y a un an. Mais si elle travaille tant aujourd'hui, c'est parce qu'elle réalise son rêve, qu'elle est dans la lumière comme elle le souhaitait, qu'elle peut chanter et danser presque tous les jours. Ca mérite bien de faire tous ces efforts. Un jour elle sera une belle jeune fille, puis une jeune femme.

Sa carrière ne durera sans doute pas plus de 10 ans, c'est le métier qui veut ça, mais ce seront dix années passionnantes, intenses... c'est une chance que peu de filles de son âge ont. A quoi ressemblera sa vie après ? Est-ce que ce sera dur de se reconvertir ? Pourra-t-elle se marier et avoir des enfants comme la plupart de ses amies d'enfance ? Est-ce qu'au long du chemin elle ne va pas se perdre dans cet univers ? Quels sont les problèmes ou peut-être les scandales qui l'attendent ? Est-ce qu'elle aussi, elle fera partie de ces idols sacrifiées qui ne pourront jamais avoir une vie normale ? Au bout du chemin, il y a aussi des tas de choses désagréables pour elle...

Koharu a 13 ans. Mais l'an prochain, elle, elle en aura 14. Et c'est ça qui n'a pas de prix dans l'histoire.

28 avril 2006

12 heures

Tout se joue et rien en se joue. Les enjeux de ce qui se passe dans 12 heures sont, finalement, plus que négligeables. Ma vie ne va certainement pas être bouleversée par ce week end alors pourquoi toute cette appréhension ? C'est ridicule. Si vous le voulez bien, voyons ça ensemble. (et si vous ne le voulez pas, vous savez sortir de là !)

La vérité vraie c'est que je n'ai pas envie que ma vie change, du moins pas dans ce domaine. Je suis tellement satisfaite de mon célibat ! En fait c'est surtout la perspective d'avoir quelque chose sur quoi fantasmer (et même pas nécessairement au niveau sexuel) qui est le plus grisant. Irais-je me plaindre s'il venait à se passer quelque chose ? Peut-être pas quand même, certes, justement parce qu'être capable de rêver que c'est possible est un délice à lui seul. Mais j'avoue que s'il ne se passait rien je me contenterais de cet état de fait sans problème. Je ne cherche pas quelqu'un, je ne suis pas en demande. J'ai plein de choses à gérer sans ça et finalement je m'en suis très bien passée dernièrement.

Me laisser croire que c'était possible a-t-il pu permettre que je laisse croire que c'est possible ? (attention, faut suivre) Le problème quand deux personnes sont en jeu, c'est qu'on n'est jamais sûr à 100% de ce qui se passe chez l'autre (si je n'ai pas au moins retenu ça de la dernière fois, quand même, c'est que je n'ai rien retenu). Je me sais capable de jongler avec l'idée de cette éventualité sans trop de conséquences, comme avec une petite balle qui tiendrait dans la main et qui, si elle tombe, n'est pas suffisamment lourde pour m'écraser le pied. Mais je suis pas la seule, n'est-ce pas ? Comment savoir si l'autre en attend plus que moi ?

C'est finalement ça, le défi dans 12 heures. C'est que quel que soit mon degré d'attachement, le sien n'est pas systématiquement identique, et il faudra gérer ça.

J'ai jonglé pendant deux à trois semaines, la balle a tourné, virevolté, sauté, rebondi, ça m'a amusée et je n'étais qu'à moitié consciente d'y jouer, je me rendais avant tout compte du plaisir du jeu et du fait que c'est une balle qui me plaît. Mais après ? Ai-je envie de devenir pro du basket ou du volley pour autant ? Rien n'est moins sûr. Mais... si je ne veux pas continuer à jouer à la balle, moi, dans 12 heures ?

Certes, j'ai peur. Mais j'ai avant tout peur du rejet, au cas où. Et simplement parce que de tout temps le rejet m'a terrifiée. Quelle que soit l'identité de la personne qui me rejette, ça me glace le sang d'y penser.

Finalement je savais bien que j'en arriverais là. Que ça ne se passait pas dans 12 heures. Je sais très bien ce que je veux : je veux avoir des portes ouvertes sur mes petits rebonds de balle, tranquillement. Je veux qu'on me donne des occasions de rêver que c'est possible sans en faire quelque chose de réel. Je veux me dire que si je veux, c'est faisable, mais je ne le veux pas. Je savais bien que je me rappellerais de tout ça au dernier moment et que je me dirais "oh pis flûte, j'y vais pas". Je vais y aller, parce que j'ai promis, mais j'ai pas vraiment envie qu'il en ressorte quelque chose. Si ça arrive ce sera que je me suis laissée allée sur le moment à ce qui est possible. Mais je ne le veux pas. C'est trop compliqué pour moi.

C'est un peu (épargnez-moi vos rires) comme si on me donnait la possibilité de devenir mannequin. L'idée qu'on m'offre la possibilité de voyager, travailler, gagner de l'argent, peut être séduisante. Mais entre nous, moi qui n'aime pas les fringues, qui aime bosser dans un coin de bureau tranquillement, et qui ai horreur qu'on me retouche les vêtements ou les cheveux, je sais bien que c'est pas un boulot pour moi. C'est pareil. C'est pas pour moi.

C'est une idée amusante et elle aura duré jusque dans 12 heures. Mais à ce moment-même, tout ce qui en faisait le charme aura disparu. Ce sera devenu une réalité, avec ses avantages et ses inconvénients. J'ai déjà pas mal de choses dans ma vie qui ont des avantages et surtout des inconvénients, non ? Est-ce que j'ai en plus envie de m'embarrasser à gérer des relations avec quelqu'un, de quelque ordre qu'elles soient ? Bah non. La voilà la vérité : non. J'ai pas envie. J'ai pas envie de ces complications dans ma vie. J'ai juste envie de rêve et ça je l'ai, je fais plus que m'en contenter : dans ce domaine, c'est actuellement la limite de ce que je veux. Le reste est en trop.

C'est trop tard pour faire marche arrière, puisque j'ai promis. Et puis ya une bonne dose de curiosité, maintenant, avec la sauce qui est montée pendant une semaine (auto-alimentée par nous deux, qui avons continué à faire rebondir la balle encore un peu). Je me demande comment ça va tourner, mais ya un scenario qui me fait peur, et un qui ne m'intéresse pas. Ca laisse peu d'ouverture à ce qui va se passer dans 12 heures non ?

Je ne veux pas me laisser emporter par l'ivresse du moment et de l'attente. Je ne veux pas non plus blesser qui que ce soit. Je m'aperçois que je suis une enfant qui n'a pas trop envie des jeux des grands et qui s'est une fois de plus fourrée dedans parce qu'elle n'a pas fait attention.

Donc : je vais y aller, il ne va rien se passer, et la magie sera morte.

Bordel, ça valait le coup.

14 mai 2006

Les nuits d'été sont de retour

Une bonne musique ou une bonne série, la fenêtre ouverte et une tasse de thé tiéde dans les mains, les odeurs de grillades et les bruits de la rue qui deviennent soudain plus gais et vivants... l'été revient, doucement.

Jusqu'à l'été dernier, je n'affectionnais pas plus que ça l'été. D'ailleurs je continue de préférer l'hiver pour beaucoup de situations. Mais une soirée d'été à la maison, j'ai appris à aimer l'an dernier, lorsque j'ai passé cet été dans cet appartement si grand, juste après être partie de chez ma grand'mère et avant d'arriver où je vis à présent. Dans la cour, les bruits des appartements des autres : de la vie mais qui ne vient pas perturber la vôtre. Juste un peu de spectacle auditif, lointain, pendant qu'on se laisse aller à la douceur de l'air. Tout le monde, moi la première, vit fenêtre ouverte. Les odeurs communiquent, les sons, quelques lumières. La nuit tombe sans que vraiment la lumière ne disparaisse, l'air est compact à cause de la lourdeur du ciel pendant la journée. Parfois quelques orages font remonter des odeurs de terre depuis le sol. Se mettre sur à son bureau ou assise au pied du lit, un peu de thé dans les mains, et se laisser impreigner...

Il y a une certaine poésie dans tout cela, et une certaine sensualité aussi, quelque part. Ca fait du bien. J'avais oublié...

Les beaux jours reviennent ! Je ne m'en étais jamais réjouie.

Et ce qui est merveilleux c'est que je sois capable encore, après l'année que j'ai passée, de me réjouir de tout cela. Tout n'est pas perdu.

1 décembre 2006

Vitrines

C'est bien comme ça que ça se passe, non ?

Boy meets girl. Nan, dans notre cas ce serait plutôt geek meets girl. Peu importe.

On se plaît, on tente, ça marche, on fait le pas au-dessus, ça se passe plutôt bien, on continue... De récentes conversations m'ont fait réfléchir au fait que, parfois, les choses évoluent. Tout n'est pas nécessairement voué à l'échec. On montera sans doute une ou deux marches ensemble, au train où ça va. Il a l'air de le penser plus facilement que moi. Il me lance des trucs "quand on aura plus d'argent, on prendra plus grand".

Je le regarde, sidérée. Un homme qui parle au futur ?! Il plaisante ou quoi ?! J'en suis, dans ce domaine, à vivre au jour le jour. Un ptit fantasme de temps en temps, rien de bien méchant, mais c'est loin de m'occuper l'esprit. A vrai dire, s'il ne lançait pas l'idée, y songerais-je seulement ? Ce n'est pas que ça me déplaise (ça se passe si bien), mais c'est vraiment que ça ne m'effleure pas.

En général, là où bloque ma réfléxion, c'est à me demander : y songe-t-il par naïveté parce que c'est sa première relation sérieuse ? Ou bien est-ce moi qui suis blasée/blindée ? Les deux ? Aucun ?

Moi aussi j'avais des rêves à une époque. Moi aussi j'étais capable de ça. Cette jeune fille en moi, capable de rêver d'avenir, semble être morte quelque part entre Nantes et ici... Comme si, quand je commence à rêver à ce genre de possibilités, une flaque d'ombre se répandait en moi, et recouvrait tout d'incrédulité. Je ne rêve plus : j'espère. Avec une certaine forme d'arrière-pensée obsédante : quelle que soit la chose à laquelle j'aspire, je ne l'aurai pas.

Quand ma grand'mère était petite et qu'elle s'arrêtait dans la rue pour regarder les vitrines, sa mère lui disait sèchement : "pas la peine de regarder, tu ne peux pas l'avoir". Yavait pas de sous et quatre enfants...

Je voudrais retrouver la fraîcheur d'esprit qui me permettait de regarder les vitrines, au moins. Après tout, ça ne coûte rien.
Elle est en plus très jolie, cette vitrine. Il y a là un homme que j'aime, avec lequel il est possible de vivre exactement comme je le souhaite.

J'hésite à regarder. J'ai peur de n'avoir pas les moyens, j'ai peur d'être déçue que ce soit hors de portée. d'une certaine façon, même si tout cela est devant moi, il y a toujours une vitre qui fait barrière. Alors c'est vrai, autant ne pas me faire du mal.
Pour le moment, nos vies n'en sont pas au point où il a quelque chose de plus à me proposer. Et nous en sommes, je crois, tous les deux parfaitement conscients. On n'aura peut-être même pas le temps d'atteindre la marche suivante, après tout, qui sait ? Pourquoi m'en faire ? Et jusqu'à la prochaine phrase de sa part, je penserait de la sorte... et ainsi de suite.

A un moment, il faudra peut-être accepter que les choses peuvent aller au-delà de ce que nous vivons maintenant. mais je n'ai pas envie de prendre le risque d'y penser pour le moment.

J'espère qu'il me laissera encore un peu vivre comme si nous n'avions pas vraiment d'avenir. Que je me préoccupe d'autre chose : de santé, de travail, de projets...

...De Noël. Les vitrines que je veux bien regarder actuellement.

20 décembre 2006

Noël, on se retrouvera !

Noël était et est encore ma fête préférée de l'année. Même pas ex aequo.

En général il y a deux écoles de pensées sur les lèvres et sur les blogs à cette période de l'année : d'un côté les cyniques, les déçus, les blasés, sur l'air de "Noël, cette fête commerciale et/ou païenne qui ne me touche pas" (ce qui se défend), et de l'autre les émerveillés, les Peter Pan de bas étage et autres adeptes du tout-va-bien qui entonnent (en chorale, ça va de soi) le refrain du "la plus belle fête de l'année, et celle des enfants" (là aussi c'est un point de vue qui en vaut un autre). Je ne me situe pas vraiment parmi les naïfs, mais pas non plus dans le lot des éternels trouble-fête. Les illuminations, les premières neiges, le repas pantagruelique... tout ça me fait plaisir mais je n'y recherche pas une sorte de réminiscence d'innocence héritée de l'enfance ou que sais-je. D'abord mes Noëls d'enfant, étaient-ils merveilleux ? S'ils l'étaient alors je ne me souviens pas des bons. Je me souviens de déconvenues, de scènes de famille, de quelques mots assassins (ceux-là, Monsieur Moustache, elles sont sur ton compte, crois-moi), mais ai-je eu des Noël extraordinaires ? Pas sûre.

Pourtant Noël reste ma fête préférée. Peut-être parce que je n'ai pas encore pu la célébrer comme je le voudrais vraiment. Peut-être que mon Noël à venir symbolise ce que j'attends de la vie...

Pourtant j'aurais toutes les raisons de jouer les tristes sires. Depuis 3 ans, ce n'est plus vraiment Noël. La première fois, c'était une question de circonstances (je l'ignorais à ce moment mais ce Noël en tête-à-tête avec ma grand'mère devait être l'avant-dernier avec elle). La seconde, c'était une question de moyens et de moral. Pour notre troisième round avec cette entêtée de fête, je ne pense pas que je mangerai juste des pâtes comme l'an dernier, mais je mangerai seule.

Vous allez me dire "alors pourquoi ne pas fêter Noël en famille ?". Déjà il faudrait qu'on me l'ait proposé. Ce n'est pas le cas. J'ai effectivement une invitation pour samedi, que finalement je ne vais pas décliner (en même temps ils s'y sont pris au dernier moment, je vais les laisser mariner jusqu'à demain soir pour la réponse, c'est un juste retour des choses) mais pour fêter Noël, rien. Et puis d'ailleurs soyons francs, même si je devais fêter ce jour-là précisément avec eux, bah, ça ne rendrait pas le Noël plus gai. J'en ai pas envie et si je décide d'y aller samedi, c'est histoire de, rien de plus. Ya un cinoche à la clé en plus, je suis pas allée au ciné depuis trois ans au bas mot, belle occas'. Comme qui dirait : "les plus belles années de ma vie sont derrière moi... Et elles sont nulles." Les Noëls de mon enfance ne me manquent pas, comme je l'ai dit, et ce n'est pas avec eux que j'ai envie de me créer de nouveaux souvenirs.

En plus cette année il manquera quelqu'un, et comme chaque fois que je vais chez eux depuis mars, j'aurai l'impression de ne voir que ce vide. Pas besoin de ça, on est d'accord.

Pour la troisième année consécutive, ce n'est pas vraiment Noël dans mon coeur. Ca ne me manque pas. J'ai en fait l'impression que Noël est en pause. Je serai vraiment en fête quand ce sera véritablement l'occasion d'être guillerette et insouciante, d'accrocher plus de guirlande que ce que mon vrai sapin qui sent bon pourra n'en supporter, de cuisiner mon pain d'épices, mon vin chaud, et fêter ça dignement.

Cette année, pas de Noël, inutile de faire semblant. Mais quand viendra le retour de la vengeance, ce sera magnifique, je ne me fais pas soucis. En attendant pas la peine de déprimer sur quelque chose que je ne peux pas avoir à mon goût.
Mais tu ne pers rien pour attendre, Noël, on se reverra !

19 mai 2007

Il y a le travail, et puis il y a l'emploi...

Non, ce blog ne devient pas politique, si jamais il devient quoi que ce soit.

Mais ce soir je m'interroge sur la différence entre le travail et l'emploi, qui semble soudain si grande que ces deux éléments méritent d'êtredivisés en deux ministères distincts dans notre nouveau gouvernement.
Pour le moment je ne vois personne souligner cette étrangeté.

Rappelons tout de même que les ministères de Nicolas Sarkozy sont ceuxd'un regroupement des administrations, car il souhaitait aller à l'efficacité. Mais des thèmes qui me semblent proches font l'objet de ministères séparés. Ainsi Mr Borloo a-t-il à sa charge le ministère de la Stratégie économique, entreprises et emploi ; tandis que d'autre part Mr Bertrand récupère une portefeuille au ministère du Travail et des relations sociales.

Je n'ai pas envie de faire un procès d'intention. Je me demande juste pourquoi faire ce distingo entre, théoriquement, ceux qui travaillent (pour Mr Bertrand) et ceux qui cherchent un emploi (pour Mr Borloo, donc). D'autant que la stratégie économique et les entreprises jouent un rôle dans les deux cas, en fait, de la même façon que les relations sociales (qui me semblent un terme bien flou à l'heure actuelle, à part que cela implique que Mr Bertrand sera la cible prioritaire des syndicats indignés, et comme souvent ils le seront rapidement) concernent les deux parties.

Si encore il y avait eu d'une part, un ministère de l'emploi, et d'une part, un autre du travail, ç'aurait été à peu près logique puisque ç'aurait pu signifier qu'un ministère entier allait se consacrer à faire baisser le chômage, tandis qu'un autre aurait géré les relations avec les partenaires sociaux pour diverses réformes. Mais là, des thèmes communs brouillent les pistes et donnent à penser que ces deux ministères n'auraient pu en former qu'un.

Alors pourquoi cette différence ? Faut-il y voir une discrimination ? Est-ce à penser qu'opposer les chômeurs et les travailleurs va permettre de faire passer certaines lois pour un ministère, puis l'autre ? Est-ce à penser que le fossé va se creuser entre ces deux groupes de personnes, à l'heure où il est si facile de tomber au chômage, et plus difficile de devenir travailleur ? Est-ce à penser qu'il y aura discrimination, ou différence de traitement, entre deux parties de la population ?

Quand je lis "Stratégie économique, entreprises et emploi", je me demande pourquoi les deux premières parties de la dénomination sont toutes consacrées à un esprit fondamentalement libéral (on est dans le vocabulaire de la droite économiquement décomplexée, à fond les ballons), et pourquoi l'emploi apparaît comme un cheveu sur la soupe. Vous allez dire que je me fais des films et c'est possible, mais dans ce contexte, ma perception me fait plutôt comprendre que l'emploi va être vu du point de vue des entreprises, pas des chômeurs, et donc qu'il y a la perspective pour eux d'être utilisés, d'être ballotés, pas d'être réinsérés dans la vie professionnelle à long terme, mais bien de servir, d'une certaine façon, de réserve de contrats courts, d'interim et autres joyeusetés.

Et d'autre part, quand je vois "travail et des relations sociales", j'ai la sensation de voir bâti un organe institutionnel puissant pour lutter contre les syndicats. Je n'ai aucune affection particulière pour l'action syndicaliste à grande échelle ; quand on voit la proportion de travailleurs réellement syndiqués, on se demande vraiment si les syndicalistes ont encore une raison d'être lorsqu'on les voit bloquer les rues ou les routes ou que sais-je... évidemment, avoir un syndicat dans l'entreprise, et donc un interlocuteur qui puisse être à nos côtés dans les embrouilles et autres négociations, au cas par cas, je trouve ça plus normal et pratique, donc restons relatifs. Mais là je me dis : ils vont se recevoir une sacrée râclée s'ils tentent quelque chose. Pourquoi ? Parce que le dialogue social, il se fera contre un ministère qui a dans les mains "le travail". Wow. Dans le genre menace implicite, je vois difficilement mieux !

Evidemment, évidemment, ce n'est pas la seule chose que j'aurais à dire de notre nouveau gouvernement, ce soir. Mais c'en est une qui n'a apparemment pas choqué grand'monde, sans doute grâce à d'autres ministres ou ministères plus choquants au commun des mortels.
Mais je ne peux pas m'empêcher de m'interroger : quelle a été la démarche intellectuelle du Président et du Premier Ministre pour arriver à la conclusion que, sur une quinzaine de ministères, il fallait séparer ces deux-là ? La symbolique m'interpelle quand même.

5 juin 2007

Plus loin et plus près

La semaine dernière, c'était l'anniversaire de mon père.

Je ne lui ai pas fêté. Moins je lui parle, mieux je me porte. A vrai dire ça fait plusieurs mois que nous ne nous sommes pas adressés la parole. C'est bien comme ça, pas pressée que ça change, qu'on ait une opportunité, un motif, une excuse. Un alibi. Les choses ne seraient alors pas différentes : on se parlerait sur le même ton, soit de choses anodines pour éviter les écueils tant de fois percutés, soit de choses importantes en n'en disant que la moitié, histoire d'avoir l'impression que l'on se parle sans offrir le flanc à l'autre. Telle est notre relation, type guerre froide, depuis quelques années.

Je pourrais m'en plaindre mais ça me convient. Je sais qu'il est trop tard pour construire avec lui la relation que j'aurais voulue vivre avec mon père. Il ne changera jamais, et je pense pouvoir commencer à dire que moi non plus, et ni l'un ni l'autre n'en avons envie en tous cas. Oui, nous voudrions sans doute tous les deux, dans notre coin, nous entendre, et sans doute chacun, de son côté, soupire sur les occasions de passer du temps ensemble qui nous échappent. Nous soupirons, mais apparemment, nous avons compris la leçon : nous n'essayons plus. Moi en tous cas, je n'y engage plus mes forces comme à un moment il y a quelques temps.

Depuis que ma grand'mère maternelle est morte l'an passé, cela a ravivé en moi cette préoccupation que mon père mourra un jour, et que je serai probablement passée à côté de lui, et que nous ne nous serons jamais compris. Et surtout, que je n'aurai jamais certaines réponses. Mais je sais que chaque fois que nous avons essayé de nous parler naturellement, d'avoir une sorte de lien qui aille au-delà de nos griefs et de nos blessures, au moins l'un de nous, sinon peut-être les deux, a été heurté. Le gouffre est insondable, le gouffre est infranchissable, et je crois qu'en fait, nous l'apprivoisons depuis quelques temps au lieu de bêtement insister et nous péter les rotules à sauter par-delà ce gouffre.

Il est stupide, ce gouffre. Il existe et je ne sais même pas comment la première brèche est apparue. Par contre je sais ce qui l'a élargi, en nous séparant plus encore et plus encore, et le pire, c'est qu'aucun de nous n'a voulu ça consciemment, ça s'est fait parce qu'il ne se contrôlait pas toujours, et parce que son manque de maîtrise m'a blessée à une période où j'étais enfant et donc fragile. Non, aucun de nous n'a voulu ça et sans doute est-ce la raison pour laquelle, mon père et moi, sommes certainement en train d'avoir des regrets vis-à-vis de cette relation, au moins de temps en temps.

Pourtant, depuis... je ne sais pas, deux ans ? Peut-être un peu plus ? J'ai réalisé un truc dingue. Quelque chose à quoi je me garde bien de penser trop souvent mais dont je sais que c'est vrai. Une sorte de petite luciole dans mon coeur, pas tout-à-fait éteinte, à la lueur pas trop envahissante. Maintenant que les plaies ont cicatrisé, que je n'ai plus de venin à lui cracher au visage, je peux dire que mon père, je l'aime. Il est juste faible, parfois -et sa faiblesse a eu sur moi des conséquences qui m'ont marquée à vie, même s'il ne se rend probablement pas compte à quel point.

Ces derniers mois, alors que je ne lui parle plus (c'est là toute l'ironie), je pense beaucoup à lui. Parce qu'en ce moment, la police est au coeur de bien des débats... mais aussi parce que la lecture de certaines choses m'a donné envie de mieux comprendre ce qui avait pu faire de lui cet homme. Des témoignages de flics m'ont fait voir les choses différemment. J'aurais pu comprendre toutes ces choses lorsqu'il m'obligeait à regarder des reportages sur la Police, quand j'étais plus jeune, mais déjà j'étais plus jeune et donc dans une phase de ma vie où je le regardais avec d'autres yeux, et puis je crois que je ne comprenais pas certains aspects de la vie, tout simplement. La souffrance humaine, je ne dirai pas que je connais bien, mais je suis capable de plus d'empathie que l'ado tournée sur ses propres souffrances que j'étais alors. De témoignage en témoignage, je comprends ce qui a pu le ravager. Je ressens une forme de tendresse pour lui, et j'imagine ce qu'il a pu expérimenter dans ce métier de dingue -un métier plus ingrat encore que celui de père.

Ces derniers mois, aussi, je ne sais pas pourquoi, j'éprouve un regain d'intérêt pour quelque chose qui me semble le caractériser : les travaux. Il a entièrement refait la maison de ses mains, presque sans aide, et l'odeur de la peinture, celle du bois coupé, celle du ciment, m'évoquent cette partie-là de notre vie qui a duré pas loin d'une douzaine d'années, pendant lesquelles, week end après week end, il s'attachait à retaper cette vieille maison. Et les meubles, le gros oeuvre et la décoration, me font penser à lui. D&CO, c'est ce rendez-vous avec mon père, aussi stupide que ça paraisse. Il est possible que mon père n'ait jamais aimé faire tout cela (en-dehors du fait évident que c'était éreintant pour lui, peut-être n'y a-t-il jamais même pris goût), mais moi j'aime tout cela à la base, ça m'intéresse, et en plus, j'ai l'impression que ça me rapproche d'une partie de lui. Une partie de lui qui était presque dans de bonnes dispositions, à quelques exceptions près (la montée d'escaliers...). C'est stupide d'une certaine façon, vu qu'on ne s'est pas parlé depuis si longtemps, mais je me sens plus proche de lui que je ne l'ai jamais été.

Alors, prendre le risque de lui parler ? Mettre à nouveau à terre l'image presque reluisante, en tous cas digne, de mon père ? Courir le risque qu'à nouveau, nos différences nous claquent à la figure, comme une bretelle mal attachée ? Non. Non certainement pas.

Je crois que ce que je viens d'écrire ici est la chose la plus gentille, la plus humaine, la plus sensée que j'aie jamais pensé de mon père. Et le plus triste, c'est qu'il ne le saura jamais.

Les relations entre les gens qui se font souffrir sont vraiment mal faites.

23 août 2007

Au mérite

J'ai été élevée dans l'idée que dans la vie, "tout se mérite", et qu'"on n'a que ce qu'on mérite". On vit de toutes façons dans une société qui pense en terme de mérite. Il faut mériter ce que l'on a et même ce que l'on est. Etre français, être travailleur... tout se mérite. Si tu veux le devenir, tu ne le devras qu'à ton propre mérite. Et si tu le mérites, alors tu le deviendras !

Est-ce que c'est vrai ?

Quand j'étais en thérapie il y a plusieurs années, j'étais impreignée de tout cela. Et ma psy me répétait "mais enfin, on n'a pas ce toujours ce qu'on mérite dans la vie ! et puis qui jugerait qui mérite quoi ?"
En ce moment ? Tout le monde et n'importe qui. Comme on vit dans une société basée sur des idéaux de mérite, et où, notamment avec internet, tout le monde peut trouver son espace de parole, alors n'importe qui se permet de juger de qui mérite son travail, son argent, sa liberté, sa nationalité, l'endroit où il vit...

Mes parents font partie de ces voix. Ils jugent. Ils s'octroient le droit de juger mon existence à l'aune de ce qu'ils en savent, c'est-à-dire pas grand'chose, d'autant qu'ils ne se sont jamais intéressés à un grand nombre de sujets (combien de fois me suis-je fais rabrouer le soir pour avoir parlé de mes histoires avec mes copines, sur l'air de "mais si je te demande comment s'est passée ta journée c'est pas pour ces conneries !"). Les émotions ? Ils s'en fichent. On dirait que ce sont des machines à statistiques, ils collectent des chiffres : combien de temps a-t-elle travaillé, quel âge a-t-elle, combien elle nous doit. Et le statistiques ne sont pas en ma faveur il faut bien le dire.

Est-ce que pour autant je mérite d'être traitée ainsi ? Je ne peux pas m'empêcher de me le demander... mais ce qui me semble être le comble de l'horreur, c'est que je ne parviens pas à trouver une réponse.

Au fond de moi, je suis toujours convaincue que je n'ai que ce que je mérite, et que je ne mérite que ce que j'ai. Et encore, je devrais m'estimer heureuse de l'avoir car je le mérite à peine.
Ai-je le droit d'attendre de mes parents qu'ils m'aiment comme j'en ai besoin, alors que je ne parviens pas à me réconforter moi-même ?
Souvent, je me dis que j'ai les parents que je mérite.

3 octobre 2007

Elle me dit que je suis belle, qu'elle n'attendait que moi...!

Elle me dit que je suis celle... juste faite pour son secrétariat.

Lorsqu'on est habituée aux CDD, aux remplacements et autres "on va jusqu'à la fin de la semaine, ok ?", on finit par avoir l'impression d'être perpétuellement une débutante. Après tout, vous êtes constamment "la nouvelle" quelque part. J'oublie alors facilement que, quand je dis en entretien que je suis une assistante de 3 ans d'expérience, bah c'est vrai (cumulé, mais quand même).

Exemple : là où je bosse en ce moment, la secrétaire sur le départ a pris le temps de m'expliquer comment photocopier un document, ou encore comment on répondait au téléphone. Bieeeen. Comment dire ? Je prends mon mal en patience et j'explique : ya deux-trois trucs que je sais faire, vous pouvez accélérer sur certaines explications (d'autant que c'est une boîte où j'ai déjà bossé alors je connais même quelques ficelles internes).
Dans ce département, c'est tellement ancré dans les mentalités que ce n'est pas une personne, c'est tout le monde qui me glisse, allez, une fois par jour, qu'est-ce que je dois faire et quand. Ce qui finit en général de la façon qui suit :
- Vous savez, j'ai pensé, ce serait pas mal que vous fassiez un tutorial de tout ce que vous faites. Vous voyez, vous êtes notre deuxième remplaçante cette année, ça simplifierait les choses...
- Oui. Comme ça, là ? (Et je sors un livret de 5 pages)

Je n'avais jamais réalisé jusqu'alors à quel point cette façon d'être perpétuellement la petite nouvelle quelque part, non seulement donnait cette impression à mon entourage professionnel, mais aussi s'était imprimé en moi. En fait, j'en suis à un point où, à chaque nouveau poste, je me fais la réflexion, surprise, que j'ai gardé certains excellents réflexes.
D'un autre côté, tout ce petit monde n'a pas entièrement tort : je me sens nécessairement comme une newbie, puisque je dois à chaque fois prendre tous les repères nécessaires au bon déroulement de mon travail : qui gère tel dossier, qui travaille comment, qui contacter en cas de, etc... Bref tous les trucs qui me sont nécessaires pour faire plus que les photocopies et répondre au téléphone, justement.
Alors, quand "elle" me dit que je suis la recrue idéale, qu'elle a envie de travailler avec moi et qu'elle va faire tout ce qui est en son pouvoir auprès de la hierarchie pour que ça se fasse... je réalise soudain que c'est la première fois depuis des années qu'on me considère comme une professionnelle. De facto. Et que ça ne mérite pas la discussion. Qu'elle s'est faite une idée bien précise de ma façon de travailler et que non seulement ça lui convient mais en plus, c'est ce qu'elle cherche.

Je me surprends à imaginer que cette offre se réalise, et j'imagine de travailler dans un environnement où je pourrai être reconnue en tant que professionnelle à part entière, et pas en tant que pis-aller en l'absence de X ou Y.
C'est certainement, avec la perspective de travailler avec cette personne et son supérieur que j'apprécie beaucoup tous les deux, une excitation professionnelle telle que je n'en ai jamais connue.

Imaginer que je pourrais travailler ainsi, dans de telles conditions, c'est franchement mieux que je n'avais espéré dans le cadre de mon métier depuis des années. Jusque là je pensais que je me contenterais de prendre ce qu'on me proposerait ; je n'avais pas imaginé un instant qu'on se battrait pour m'avoir. Evidemment ça flatte, mais ça rassure avant tout.

Maintenant, on verra bien si ça se fait. C'est pas anecdotique évidemment, mais c'est pas non plus le principal, finalement...

7 janvier 2008

Fenêtre refermée

« Je te pourris la vie »… Prélude à un adieu que je sais imminent et qu’il ne fera rien pour retarder. Je me contemple le calendrier en me demandant : « dans combien de mois, combien de semaines va-t-il définitivement disparaître de ma vie ? ». Cela semble inéluctable aujourd’hui. Mais cette fois-là, je ne serai pas celle qui expliciterai l’inavouable, je refuse ce rôle. S’il veut sortir de ma vie, par embarras ou autre, il faudra qu’il le dise lui-même.

Je devrais sans doute me rassurer de voir que je suis encore capable de faire partie de la vie de T. ; ce n’était pas l’intention mais j’ai découvert que, malgré tout, malgré lui aussi, trois ans après notre rupture nous faisions encore partie l’un de la vie de l’autre. Il lit mon blog (peut-être en ce moment-même) régulièrement, et moi je pense à lui aussi de temps à autres (surtout lorsque je pense à ma grand’mère…). Oui, cela devrait me rassurer après ce que nous avons vécu. Mais ce n’est pas le cas. Je n’arrive pas à me réchauffer le cœur à cette idée.

Oui, je suis malheureuse depuis plus de deux mois… C’est plutôt normal je dirais. J’ai la chance d’avoir d’autres choses auxquelles me raccrocher, et qui font que je suis simplement malheureuse, et pas à nouveau au fond du gouffre. Je n’en suis pas à me demander pourquoi je vis… juste pourquoi je fais certaines choses. D’une certaine façon je suis en progrès ! J’ai la tristesse sèche comme un hiver ; les larmes coulent en de (trop !) rares occasions, mon cœur est dur et froid et je me dessèche lentement… je suis malheureuse, mais je n’en suis pas dépressive pour autant. Simplement rien ne me réchauffe vraiment, rien ne me réjouit entièrement. Je guérirai peut-être même de ce froid, un jour, qui sait.

Oui, je suis malheureuse depuis plus de deux mois, et c’est de sa faute… Ma foi on ne va pas le nier : je suis encore très attachée à lui, et sans aucun doute je le suis plus que lui (ça me passera) (ça passe déjà).

De toute évidence, je serais plus heureuse si nous étions encore ensemble, c’est un fait. Maintenant serais-je plus heureuse si nous nous remettions ensemble ? J’en suis beaucoup moins certaine.

Il y a la nostalgie. Je repense à nos bons moments. Ca ne fait qu’à moitié mal, car je parviens à encore ressentir le bonheur et la beauté de ces instants. Ces instants que j’aimerais à la fois coucher sur le papier pour ne jamais les oublier, et en même temps que j’ai envie de ne même pas dévoiler à moi-même, à garder secrètement dans un coin de mon cœur, moitié pour qu’ils gardent leur innocence, moitié pour pouvoir les perdre progressivement dans le froid sourd qui me gagne.

Il y a encore l’attachement. Je sais qu’à chaque jour qui passe où je me sens (sais ?) rejetée, il s’étiole et disparaît lentement. Je suis loin de ressentir ce que j’éprouvais il y a à peine deux mois, c’est net. J’ai été tellement blessée et déçue que je ne peux pas faire autrement que voir ces sentiments se réduire petit-à-petit comme peau de chagrin. Ca me fait peur d’ailleurs, j’ai l’impression que cela va trop vite. Non que j’aie envie de me complaire dans des sentiments qui n’auraient plus lieu d’être, mais simplement, je trouve inquiétant que mon cœur se referme avec une telle brutalité, comme un piège ; et que le prisonnier, c’est mon avenir, condamné à se ronger la jambe. Quelque chose meurt en moi chaque jour et ça me rend infiniment triste de me dire que je ne serai plus capable de cet attachement plus tard. Parce que c’est ça qui meurt : ma capacité à aimer. Cette fois j’ai donné tout ce qu’il me restait. Mais l’attachement est encore là pour le moment.

Et puis, il y a encore le désir. Les mauvaises langues (et j’en suis) ainsi que les psys de bas étage diront que c’est ironique de ressentir pareil désir lorsque précisément il ne peut plus être assouvi. Je crois que cela dépasse le cadre de l’effet de manque : la vérité c’est que je me sens incroyablement épanouie dans un autre domaine de ma vie qui, lorsqu’il me manque, me dévore les entrailles. Pourquoi n’ai-je pas su profiter mieux de l’époque bénie où nous étions ensemble ? Simplement parce que la terreur d’être sans argent, sans reconnaissance, sans visibilité sur l’avenir, me rongeaient au-delà du raisonnable. Ce n’est pas juste de la peur, c’est de la terreur. Et je l’ai laissée me faire passer à côté de ce que j’avais déjà, réduisant ma libido à néant.

Pourtant je suis là, avec ce désir en moi, un désir que je n’ai ressenti que rarement à ce point, avec même des fantasmes et c’est quasiment nouveau pour moi ! Je ne me rends compte qu’à présent à quel point avec lui j’ai avancé dans ma vie de femme, je fais le bilan de ce que j’ai découvert, appris sur moi-même et sur lui… J’aperçois parmi les souvenirs des choses que je n’avais pas vues alors : comment j’ai réalisé mon précieux rêve du dimanche matin, comment j’ai trouvé un compagnon avec lequel il était plaisant de vivre les mêmes plaisirs… Et, bien que je m’empêche, autant que possible, d’y penser, par respect pour lui et pour me ménager, parfois je laisse échapper un soupir en repensant à son corps. Et à ses yeux…

Et je me retrouve là, avec toutes ces choses que je réalise maintenant que mes plus grandes angoisses se sont calmées, et je considère avec horreur combien j’aurais été heureuse à présent si seulement… !

Si seulement quoi, d’ailleurs ? Si j’avais été patiente ? Si j’avais été moins terrifiée ? Peut-être qu’il n’y a pas que des « si je », qu’il y a un « si il » aussi… ? De toutes façons je ne saurai jamais.

Bien-sûr que ça me pourrit la vie de ne plus être avec lui, mais le retour arrière n’est pas possible de toutes façons ; alors quoi ?

Une part de moi, qui se réveille après cette peur léthargique, a envie de désirer d’aller de l’avant. Mais la simple idée de vouloir vivre une relation à nouveau me semble particulièrement absurde et dangereuse, ne parlons même pas de concrétiser cette idée, ce serait de la folie pure ! Faut-il donc que je m’éveille à tout un tas de choses alors même que je n’ai plus envie de rentrer dans un nouveau cycle… quel gâchis.

Ni avec lui, ni avec aucun autre, je ne pourrai à nouveau ressentir cette confiance, ni cette intimité. C’est surtout de ça dont je suis en train de faire le deuil pour le moment.

18 juin 2005

L'Echec

J'ai passé le plus clair de ma semaine en entretiens pour trouver une entreprise au sein de laquelle passer mon alternance à partir de la rentrée. Je peux dire que j'ai cavalé. J'ai fait un rapide calcul mental et si on compte toutes les fois où j'ai pris la mauvaise rue (ou la bonne rue dans le mauvais sens), j'ai dû marcher une dizaine de kilomètres par jour. C'est pas mal quand même. Surtout pour moi.

Sur mes entretiens, je n'ai pas encore de réponse ferme. Que des conditionnels. Mais à part mardi où la révélation de ma non-teenagerie m'a été violemment assénée (cherchez pas dans le dico, teenagerie est un mot de moa), j'ai finalement appris aujourd'hui que les autres sociétés étaient très intéressées par ma candidature. Je reviens en tête à chaque fois.

Intérieur jour. Elle est au téléphone. Sa conseillère de placement au bout du fil. Elle l'entend dire "vous qui étiez en échec, c'est encourageant."

J'ai eu comme un sursaut. Ce que j'aime et déteste à la fois chez ma conseillère, c'est sa franchise. Elle est pire que moi car elle n'use pas d'humour. Ca fait mal. Mais c'est tellement vrai qu'une fois le téléphone raccroché je n'ai pu réprimer un soupir de soulagement. Cette chose est sortie de moi comme ça, sans prévenir. C'était bon à entendre.

L'échec était au passé.

20 juillet 2008

Nous interrompons votre programme (ou : On sait jamais)

Petite annonce à l'attention des geeks ou amis de geeks qui passeraient par ici, on sait jamais après tout.
Faites passer, surtout !


Rédactrice en chef d'un gros site généraliste sur la musique japonaise (la Jmusic, pour les initiés), vieux de bientôt 4 ans, en moyenne 70 000 visites par mois, avec une équipe d'une dizaine de rédacteurs (bénévoles) et ayant largement fait ses preuves, je cherche actuellement un développeur web (bénévole également, mais possibilité d'intéressements sur les revenus publicitaires) pour avancer le site dans sa prochaine version. On est très dynamiques, on a un site qui tourne bien, on veut juste terminer la nouvelle version ! Aidez-nous !

Pour résumer : notre ancien responsable technique nous a plantés là, mais il a déjà constitué une excellente base de départ dans un framework de son invention, encore perfectible mais actuellement viable (les rédacteurs peuvent déjà travailler dessus et ya quasi-pas de bug sur ce qui est déjà codé). La base de données est en place, il faut juste terminer de coder certaines rubriques et mettre la nouvelle version sur les rails.
Et migrer vers un hébergement sur serveur dédié (là on est sur Free).

Côté spécificités techniques : php/mySQL/Jawascript/Ajax... de la programmation par objet et une base de données avec de nombreuses interconnexions à gérer.

Idéal pour les développeurs "amateurs" qui voudraient se faire une expérience significative !!! Rien que la version actuelle du site fait déjà relativement joli sur un CV, mais la version qu'on veut finir, je vous raconte même pas comme vous pourrez vous vanter après.
L'équipe rédactionnelle n'a pas la chance de savoir coder aussi bien que vous, mais on est tous très motivés et on vous expliquera tout ce que vous aurez besoin de savoir sur le contenu du site pour lui donner un contenant solide ! On vous demande juste de savoir coder, ne pas nous lâcher, et être capable de travailler en équipe en nous tenant au courant de ce que vous faites et de l'avancement des choses, sans hésiter à poser des questions quand il y a besoin.
Vous ne connaissez rien à la Jmusic ? Le sujet ne vous intéresse pas spécialement ? C'est pas grave !

Contactez-moi par email (monpseudo@free.fr) pour nous aider à accomplir notre but : sortir notre prochaine version avant le 31 décembre ! Je suis également dispo pour toutes les questions que vous auriez, ou vous montrer la version actuellement en développement. Merci d'avance !
Et si vous voulez savoir de quel site il s'agit et voir notre version actuelle, c'est simple, dans les liens : Teruki Paradise.

27 octobre 2008

La reine des glaces

Hier, c'était la fête d'anniversaire de ma mère. Quel âge a-t-elle, au juste ? Je m'en fiche. Je crois qu'elle aussi. Elle ne compte plus les années. Son visage les marquait bien avant qu'elle ne les fête, de toutes façons.
Hier, comme ça arrive (bizarrement) plus souvent maintenant que j'ai un travail, que je suis respectable, que je suis fréquentable, j'étais chez mes parents.

Là règle tacite m'a toujours semblé, pour ce genre d'occasions, de faire comme si rien ne s'était jamais passé.
Nous n'avons jamais vécu ces années, oui, ces années, celles-là, on sait bien de quoi il s'agit, mais personne, au grand jamais, n'y fera mention, c'est le principe, c'est tacite.
On parle de travail, d'actu, de politique, des nouvelles du voisinage, des dernières vacances... On fait semblant.

C'est ce que ma famille sait faire de mieux. Semblant.

Anecdote. Ma mère déballe un cadeau offert par ma soeur, lance une blague éculée sur le fait que le paquet est aussi bizarrement emballé que les cadeaux de feue ma grand'mère, tout le monde rit. C'est drôle. C'est drôle de penser que ma grand'mère a légué le don du paquet plein de scotch à ma frangine. C'est si drôle. "Ce que fait Mémé dans ces cas-là"... non, ce que faisait, merci.
Ne faites pas ça. Vous n'avez pas le droit de faire semblant, de faire comme si elle n'était pas morte.

Plus tard dans la conversation, la pique au coeur se renouvelle. Mon père passe vingt minutes à retracer ces années-là. Oui, celles-là, tout justement.
Et à l'écouter raconter ces années-là au petit ami de ma soeur, comme elles semblent belles, ces années-là ! Etonnantes, bizarres, remuantes, drôles... le portrait qu'en brosse mon père donne l'impression que tout a été... une péripétie de plusieurs années, avec une conclusion amusante.
Ha ha ha. Comme c'est drôle. Ha ha ha, ces années-là. Sacrées années, hein. Que c'est original. Ha ha ha. Des années à se croiser sans se voir, à ne pas se connaitre, ha ha ha, la maison à refaire de fond en combles, ha ha ha, les travaux qui ont duré des années et des années, ha ha ha, ces années-là, sacrées années en vérité, je me taperais presque sur les cuisses si c'était mon genre, ha ha ha.

Je suis sur le siège d'à côté. Je suis figée par une peur glaciale. Au fur et à mesure qu'il parlait, la peur s'est glissée dans mes os pour m'emmurer. Et maintenant il finit son café, l'air de rien, il n'a toujours pas compris que ces années-là, c'est ma bête noire, la bête tapie dans l'ombre que j'ai laissée dans son coin, à défaut de mieux, à laquelle je ne donne plus rien à ronger mais que je n'ai pas su mettre à la fourrière ; ni jamais vraiment domestiquée, ni jamais vraiment ressortie de ma vie. Il ne s'est pas rendu compte que chacun de mes os est soudain terrassé par le froid le plus pénétrant, parce que mes souvenirs de ces années-là me donnent envie de pleurer, envie de hurler, envie de me cacher dans un coin d'ombre, envie d'approcher ma bête, là-bas dans son coin, envie de la gratter affectueusement entre ses deux yeux rouges phosophorescents, envie de me frotter le nez à son pelage luisant de gel, envie de redevenir la petite fille qui se cache dans les couvertures mais qui a peur du noir.
Je suis devenue un palais-igloo, un palais de conte de fée où tout est froid, vide, transparent et silencieux, et dans les couloirs de ce palais, la bête se promène comme un gentil toutou de compagnie en manque d'occupation, las, et en quête de quelque chose à ronger, et que pourrait-on bien ronger dans les couloirs transparents de mon corps si ce n'est mon coeur transi par le froid ?
J'ai perdu toute ma belle assurance, toutes mes blagues préparées à l'avance que je répète secrètement pour avoir l'air contente d'être là, mes anecdotes juteuses et mes sujets de conversation, je suis minuscule dans mon tailleurs, j'ai 8 ans, il fait froid, il fait noir, et la voix de mon père tonne de l'autre côté de la porte, ou au-dessus de mon lit, en fait un peu partout dans ma tête.
Je m'agripperais bien à la table, ou à ma chaise, ou à quelque chose, mais mes doigts sont figés dans la glace, ce sont de longs stalagtites translucides posés sur mes genoux givrés.

Et il rit, l'animal. De son rire à lui, jamais vraiment entier, jamais vraiment lâché, son rire retenu qui dit qu'il ne sait plus rire vraiment, qui ressemble à un rictus, un rictus de bête. Une bête qui mange dans la plus belle vaisselle de ma mère, mais une bête quand même. Une bête qui semble avoir décrété que sur toutes ces années-là, bon, en faisant le bilan, on voyait bien que ça n'avait pas été marrant, mais on peut quand même le prendre avec le sourire aujourd'hui, ou plutôt avec le rictus, puisqu'il n'y a plus de vrai sourire en stock depuis bien longtemps.
Soudain, pour la première fois qu'on en parle depuis tout ce qu'il s'est passé, ce sont des années qui semblent être reléguées au rang d'amusantes anecdotes sur nos années laborieuses.
Ne fais pas ça. Tu n'as pas le droit de faire semblant, de faire comme si ça n'avait pas été l'Enfer.

Mes pieds pantelants dans le vide, mon tailleur noir trop large, les chaussons qu'on m'a forcée à mettre, tout semble démesurément gigantesque et pétrifié dans la glace. Une petite fille hurle dans le silence, il y a comme de l'écho -ah non, c'est moi. En fait non, c'est l'écho de ma voix de petite fille, il y a presque 20 ans, mais aussi il y a 15 ans et il y a 10, et parfois même il y a à peine 5.

Et puis je me lève, je vais chercher ma veste dans l'entrée, et je reviens m'asseoir sur ma chaise qui a soudain repris une taille normale le temps de mon trajet, et je dis "excusez-moi, je prends ma veste, j'ai froid tout d'un coup". Je regarde ma soeur déballer le jeu de société auquel nous allons jouer. Je ris. Je ris !

C'est ce que je sais faire de mieux. Semblant.

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